Radiographie des structures de gouvernance des sociétés cotées

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Il manque à ce jour, 164 administratrices au sein des conseils d'administration des sociétés du SBF 120, soit 11% pour que la proportion des 40% de femmes soit atteinte en 2017.

 

Le gouvernement d’entreprise désigne les modes de fonctionnement des organes d'administration et de surveillance d’une organisation et leurs relations avec la direction et les actionnaires. Pour les sociétés cotées, il s’inscrit au-delà de la loi, dans les recommandations du code de gouvernance auquel l’entreprise a choisi de se référer, AFEP-MEDEF ou MiddleNext.
Deloitte publie une radiographie de la gouvernance de plus de 300 sociétés cotées au marché Euronext de la Bourse de Paris, véritable analyse des conseils d’administration ou de surveillance, des comités spécialisés et des assemblées générales du printemps 2015.

Des constats très différenciés selon les indices de cotation

Pour une entreprise du CAC 40, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance compte en moyenne 13 administrateurs, dont 9 indépendants, 4 femmes, 3 étrangers et conduit ses travaux avec le support de 3 à 5 comités spécialisés.

A l’autre bout de la cotation, pour une entreprise du CAC Small, le conseil compte en moyenne 7 administrateurs, dont 2 indépendants, 2 femmes et conduit ses travaux avec le support de 2 à 3 comités spécialisés.

« Notre radiographie a pour ambition d’être une analyse factuelle complète des pratiques de gouvernance des sociétés cotées en France. Les écarts de tendances entre les premières sociétés de la cote et les sociétés du Midcap mettent en exergue la diversité des situations. » estime Denis Lesigne, Directeur Capital Humain chez Deloitte.


Des comités spécialisés de plus en plus présents

Les comités spécialisés sont des émanations du conseil d’administration dont la mission consiste à préparer les travaux qui reposent sur des thématiques sensibles. Ils sont aujourd’hui très largement répandus avec près de 366 comités pour les sociétés du SBF120. Si l’existence d’un comité distinct du conseil sur les sujets de l’audit, des rémunérations et des nominations est aujourd’hui la norme au sein des sociétés du SBF 120, d’autres comités spécialisés émergent (stratégie, gouvernance, éthique, RSE …). Comme l’illustrent les schémas ci-dessous, ce n’est pas encore une pratique dans les sociétés du Cac Small.

Les comités spécialisés comptent plus d’administrateurs indépendants (69% dans le CAC 60) que le conseil (60%) et une mixité comparable à celui-ci (30% dans le CAC 60). Seule la présidence de comité reste une prérogative très majoritairement masculine avec moins d’un comité sur cinq présidé par une femme au sein des sociétés du CAC 60.

 

Fréquence et taux de recouvrement des comités spécialisés au sein du CAC 60

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Fréquence et taux de recouvrement des comités spécialisés au sein du CAC Small

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Poursuite de la féminisation et faible turnover au sein des conseils

Sous l’impulsion de la loi Copé-Zimmermann qui prévoit à l’issue de la première assemblée générale de 2017 une proportion de chaque sexe au moins égale à 40%, l’entrée des femmes dans les conseils se poursuit. Ainsi, le taux de féminisation des conseils, de 35% dans les sociétés du CAC 40 et de 33% pour celles du SBF120 en 2015, est en augmentation en 2015.

Toutefois, les sociétés ayant déjà atteint une représentation des genres conforme aux exigences de la loi ne sont pas encore majoritaire. Ainsi seules 10 sociétés sur 37 du CAC 40, soit 27% remplissent le quota des 40% de femmes au sein des conseils d’administration et de surveillance.

Si l’on ne considère que les sociétés du SBF120, le nombre de nominations nécessaires à l’atteinte des 40 % d’ici 2017, est de 165 administratrices nouvelles calculées dans l’hypothèse d’une stabilité du nombre d’administrateurs. Ce chiffre, comparé aux 34 nouvelles administratrices, en évolution nette, nommées durant les AG 2015, laisse entrevoir le chemin qui reste à parcourir.

L’analyse des départs, des renouvellements de mandats et des nouvelles nominations d’administrateurs entre 2013 et 2015 révèle un turnover faible (14% pour les sociétés du CAC 60) et un rajeunissement des conseils. Ces mouvements se caractérisent par une poursuite de la féminisation, une internationalisation accrue (24 administrateurs étrangers ont fait leur entrée), mais également par l’arrivée de 25 administrateurs indépendants.

Les rémunérations des administrateurs très fluctuantes d'une société à l'autre

La radiographie de Deloitte n'aborde que la rémunération des administrateurs versée sous la forme de jetons de présence, sans référence à celle octroyée au titre de fonctions exécutives ou au titre de missions particulières.

Le premier constat est celui d’une variabilité très importante des pratiques d’une société à l’autre. Si le montant des jetons de présence est en moyenne de 63 000€ /an pour une société du CAC 40, les pratiques observées varient de 22 000€ à 140 000€ annuels. Pour une société du CAC Small, la moyenne se situe à 14 000€ avec une amplitude de pratiques variant de 3 000€ à 42 000€ annuels.

Dès lors, se pose la question de l’absence d’un « marché des administrateurs » en comparaison au « marché des rémunérations » que l’on observe pour les salariés. Cela va probablement, dans les prochaines années, générer des enjeux de rétention et d’attractivité pour certains conseils.

Le second constat, moins attendu, est celui de l’existence, au sein du CAC 40 et au sein du CAC Small, d’un écart de rémunération entre les administrateurs et les administratrices. Ainsi au sein du CAC 40, la rémunération versée à une administratrice est en moyenne 12% inférieure à la valeur médiane des jetons de présence versés aux membres du conseil, tous sexes confondus, auquel elle appartient. Inversement, celle versée à un administrateur homme est en moyenne 4% supérieure à la valeur médiane des jetons de présence versés aux membres du conseil.

Même si dans le cas des sociétés du CAC 40, celui-ci peut s’expliquer par les indemnités versées aux membres et aux président des comités spécialisés et par le faible taux de présidence féminine de ces instances, il conviendra, à l’avenir, de surveiller cette tendance.

Avec seulement 2% de résolutions rejetées, les assemblées générales sont encore très loin d’être des instances de contestation

Les assemblées générales 2015 n’ont pas provoqué́ de « printemps des actionnaires » et, conformément à la tradition, les résolutions proposées au vote des actionnaires ont été adoptées à très grande majorité (taux d’approbation moyen proche de 94%). Pour autant, les résolutions dites « Loi Florange », proposant une modification des statuts afin d’y inscrire le principe « une action, une voix », ont conduit à de nombreux débats et à une opposition entre les actionnaires et l’Etat dans certaines assemblées.

2015 était également l’année II du « Say on Pay » concernant la rémunération des dirigeants mandataires sociaux, et les réactions des actionnaires étaient attendues, après une année 2014 sans contestation majeure. Cette année si aucune résolution n’a fait l’objet d’un rejet de la part des actionnaires, l'approbation a significativement été moins unanime : seules 24% des sociétés ont approuvé à plus de 98% la résolution Say on Pay.

Les assemblées générales ne sont plus des présentations unilatérales de l'entreprise, où les actionnaires valident à l'unisson les résolutions proposées par le conseil d'administration. Un tiers du temps est désormais consacré aux questions-réponses et les entreprises ont significativement accru la qualité et la part des présentations détaillées.

Le temps des taux d'approbation systématiquement supérieur à 95% est probablement révolu et les projets de résolutions ouvrant à débat (rémunération, Long Term Incentive – stock options et actions de performance, conventions réglementées, droit des actionnaires...) recueilleront à l'avenir les suffrages d'une majorité moins unanime.

« Désormais, le résultat d'un vote sera-t-il à relativiser avec la nature de la résolution soumise au vote ? Ainsi 1% des résolutions relatives à l'approbation des comptes ont recueilli un score inférieur à 90%, alors que 30% de celles relatives à la rémunération du DG ou PDG l’étaient dans cette situation. L'influence de la structure du capital, et dans une moindre mesure, les recommandations des agences de conseil en vote, restent les premiers facteurs de différenciation observés » conclut Denis Lesigne, Directeur Capital Humain chez Deloitte.

L’évaluation des travaux du conseil est devenue une pratique courante pour les sociétés se référant au code AFEP-MEDEF

83% des sociétés se référant au code AFEP-MEDEF mentionnent un processus d’évaluation des travaux du conseil (100% pour celles cotées au SBF 120). Au sein du CAC 60, un tiers des entreprises ont recours à une évaluation externe. Ce pourcentage tombe à 12 % pour les sociétés du CAC Mid 60 et à 5 % pour le CAC Small.

« Cette étude dresse une vue d’ensemble des pratiques de gouvernance des sociétés cotées françaises. Il faut toutefois garder à l’esprit leur taille relative et la nécessaire adaptation des solutions aux situations, chacune d’entre elles étant toujours spécifique. La seule réfléxion transverse qui puisse être menée est d’ordre méthodologique. A cet égard, l’évaluation du conseil est, pour les grandes entreprises, un exercice rodé dont l’apport est reconnu notamment en termes de fonctionnement du conseil. Le CAC Mid 60 et le CAC Small restent manifestement à convaincre de l’intérêt d’un apport externe. Autre voie de progrès, l’évaluation reste un processus plutôt autocentré. Les relations avec les actionnaires ou les parties prenantes ne sont pas évoquées et il est rare que le conseil considère son action de manière pluriannuelle ou revienne sur les décisions prises ou pas » conclut Carol Lambert, Associée Ethique et Gouvernance responsable du Centre de Corporate Governance chez Deloitte France.

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