La Commission européenne se prononce contre la législation allemande en matière de restructuration des entreprises en difficulté

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Ellen Delzant - Avocate - Schultze & BraunLa Commission européenne a décidé que certaines mesures de restructuration, dénommées “Sanierungsklausel”, prévues dans le cadre de la loi allemande de taxation des entreprises, sont incompatibles avec la législation européenne car constitutives d’aides étatiques illégales. La décision a été rendue publique mercredi 26 janvier et n’est bien entendu pas une réelle surprise. Ellen Delzant, Avocate, Schultze and Braun GmbH, fait le point.

La législation sur les “Sanierungsklausel“ (ou clause d’assainissement) a été adoptée en juillet 2009 mais prévoyait un effet rétroactif au 1er janvier 2008. A l’origine seulement prévue comme un instrument temporaire pouvant permettre de surmonter les conséquences de la crise financière, ces dispositions ont pourtant été rendues permanentes depuis décembre 2010 par le législateur allemand. La Commission appris cette nouvelle par le biais des médias et décida en conséquence d’ouvrir en février 2010 une enquête approfondie sur ce thème.

La législation sur les clauses d’assainissement permet aux entreprises en difficulté de reporter les pertes d’une année donnée sur les bénéfices des années suivantes, même en cas de changements importants de leur actionnariat. En effet, la loi allemande de taxation des entreprises ne permet normalement pas le report de pertes en cas de modifications importantes de l’actionnariat et la Commission a donc conclu qu’un avantage financier était procuré à certaines entreprises et probablement à leurs acquéreurs.

L’intention initiale du législateur allemand était bien d’éviter que n’importe quelle transaction sur des pertes ne soit faite lorsqu’il a limité les possibilités de report de pertes sur des profits futurs en cas de changements importants de l’actionnariat. Dans un souci de simplification et afin d’augmenter les recettes fiscales, une réforme de la législation eut pourtant lieu en 2008. Cette réforme abolit la définition selon laquelle les acquisitions pouvaient être regardées comme abusives lorsque cette opportunité n’était utilisée que dans un but de déduction des pertes sur les années suivantes et a donc fermé certaines voies en matières de restructuration d’entreprises en difficulté.

Il serait donc souhaitable que la décision de la Commission puisse aboutir à la modification et la mise en conformité du Code allemand sur la fiscalité des entreprises concernant les possibilités de déduction de pertes sur les années suivantes en cas de changement significatif dans la structure de l’entreprise.

L’impact immédiat de la décision de la Commission reste pour l’instant que les autorités fiscales allemandes devront désormais collecter toutes les aides accordées par le biais de clauses d’assainissement. Ceci, par contre, seulement pour les cas rencontrés après avril 2010 ; date à laquelle le Ministère des finances allemand décida que les clauses d’assainissement ne seraient plus applicables tant que la Commission ne se serait pas prononcée sur ce thème. Bien entendu il existe une possibilité que la Cour de Justice soit saisie dans le cadre de cette procédure, puisque non seulement la République fédérale allemande, mais aussi toute personne assujettie à l’impôt peut désormais se diriger vers elle.

Ellen Delzant, Rechtsanwältin et Avocate