Conformément au marché européen il est de plus en plus courant que des entreprises européennes aient des intérêts dans d'autres pays de l'Union, c'est le cas notamment des relations entre la France et l'Espagne. Jean Marc SÁNCHEZ, avocat aux barreaux de Paris et Madrid et responsable de la commission franco-espagnole du barreau de Paris offre au Monde du Droit un éclairage sur ce sujet.
Quand une entreprise française veut employer des salariés en Espagne elle peut opter pour 2 solutions: ou bien détacher ses propres salariés de façon temporaire en Espagne (dans ce cas, elle peut choisir de maintenir le régime de la Sécurité Sociale française), ou bien elle peut directement les embaucher en Espagne.
Concernant la première option, celle-ci relève de l'application du "Droit des Étrangers espagnols" (Derecho de Extranjería) si le salarié est d'origine extracommunautaire, puisque le "Droit des Etrangers européens" (Derecho de Extranjería europeo) est loin d'être uniforme et valide dans tous les pays membres de l'Union.
Si l'entreprise française décide d'employer directement des salariés en Espagne, l'entreprise a plusieurs possibilités. Si elle souhaite avoir un nombre de salariés réduit, avec une flexibilité de travail importante (journées, horaires) et dont la rétribution soit étroitement liée à des objectifs concrets (par exemple, les commissions sur les ventes) la meilleure solution est de conclure un contrat de nature commerciale.
La Sécurité Sociale espagnole oblige dans ce cas le salarié à s'inscrire localement et c'est au salarié de cotiser chaque mois. Cette option a des avantages évidents pour chaque partie, puisque le contrat commercial offre une grande flexibilité, et il est évident que pour l'entreprise employer en France un salarié a un coût chargé serait bien supérieur, surtout si le travail à accomplir s'échelonne sur une longue durée.
Cependant, si l'entreprise désire avoir un grand nombre de salariés en Espagne ou même s'ils sont peu nombreux mais qu'il s'agit de salariés dont la relation de travail suppose une plus grande proximité, la meilleure option est de créer une filiale en Espagne.
Cette filiale aura une personnalité juridique propre, telle que par exemple la Société à responsabilité limitée (Sociedad Limitada), qui aura son propre numéro de Sécurité sociale et emploiera directement les salariés, en application du régime de la Sécurité Sociale espagnole et du Droit du Travail espagnol.
Le droit espagnol permet également qu'un représentant légal ayant un domicile en Espagne embauche des salariés, mais cette formule assure moins de sécurité juridique que les options précédentes et elle est moins utilisée dans la pratique.
Enfin, il est également possible que l'entreprise emploie directement le salarié depuis la France, mais dans ce cas le contrat de travail serait un contrat de travail international, un type de contrat qui est beaucoup plus adapté aux cadres dirigeants dont la mobilité transnationale est importante et qui peut présenter des problèmes à l'heure de déterminer quel droit est applicable ou quels tribunaux seraient compétents.
En revanche, en cas de détachement pur et simple à partir de la France, le contrat reste alors soumis au droit français.