Le Comité du Conseil de l'Europe pour la prévention de la torture (CPT) a appelé les États européens ayant une surpopulation carcérale persistante à remédier à ce problème avec détermination en fixant un plafond – à respecter scrupuleusement – pour le nombre de détenus dans chaque établissement pénitentiaire et en développant le recours aux mesures alternatives à la détention.
Dans son rapport annuel couvrant l’année 2021, le CPT souligne que même si, au fil du temps, certains pays ont réalisé des progrès tangibles dans la lutte contre la surpopulation carcérale, ce problème persiste dans de nombreux systèmes pénitentiaires, notamment dans les établissements accueillant des prévenus. De plus, même dans les pays où la surpopulation n’est pas un problème dans l'ensemble du système pénitentiaire, il est possible que certaines prisons, certaines parties d'une prison ou certaines cellules soient surpeuplées.
« La surpopulation carcérale sape tout effort visant à donner un sens pratique à l'interdiction de la torture et des autres formes de mauvais traitements, car elle peut entraîner des violations des droits de l’homme. Elle met tous les détenus en danger, plus particulièrement les plus vulnérables, de même que le personnel pénitentiaire, et compromet les efforts visant à réinsérer les détenus. Les gouvernements doivent faire en sorte que les détenus aient un espace suffisant pour vivre dignement en prison et que les mesures non privatives de liberté soient utilisées de manière adéquate, tout en garantissant que le système pénal apporte la protection nécessaire à la société », a déclaré le président du CPT, Alan Mitchell.
Le rapport rappelle que la surpopulation carcérale est principalement le résultat de politiques pénales strictes, avec un usage plus fréquent et plus long de la détention provisoire, des peines de prison plus longues et un recours toujours limité aux mesures alternatives à la détention.
En premier lieu, les administrations pénales devraient revoir en détail la capacité de chaque cellule, de chaque prison et du système pénitentiaire tout entier, en appliquant strictement les normes du CPT concernant l’espace de vie minimum prévu pour chaque détenu : au moins 4 m² dans les cellules collectives et 6 m² dans les cellules individuelles (sans compter l’annexe sanitaire). Il convient de fixer une limite supérieure absolue au nombre de détenus dans chaque prison.
La deuxième mesure cruciale recommandée par le CPT consiste à développer l’utilisation des mesures alternatives à la détention, comme le travail d'intérêt général ou les systèmes de surveillance électronique, complétées par des agents de probation et des programmes de réhabilitation. Le CPT considère que le recours aux mesures non privatives de liberté reste modeste dans de nombreux États, en particulier dans la phase précédant le procès, et ne permet pas de réduire suffisamment le nombre de personnes en prison. Il exhorte les gouvernements à travailler avec le législateur, les juges, les procureurs et les directeurs de prison et de probation pour lutter contre la surpopulation carcérale dans le cadre d’une action concertée.
Dans le rapport, le CPT se félicite des mesures prises dans de nombreux États membres pour libérer sous condition ou temporairement les détenus à faible risque et réduire le recours à la détention provisoire, afin de prévenir la propagation de la covid-19. Néanmoins, le Comité note également qu’il est apparu que certains des arguments avancés par les autorités au fil des années, selon lesquels elles n'étaient pas en mesure de désengorger les prisons, n'étaient pas toujours totalement sincères.
Enfin, le CPT avertit qu’avec la fin des mesures strictes de prévention de la covid-19, le nombre de détenus est de nouveau en hausse dans certains pays, ce qui pourrait accroître le nombre de prisons surpeuplées à l’avenir.
En 2021, le CPT a effectué neuf visites périodiques (en Autriche, en Bulgarie, en Lituanie, en Fédération de Russie, en Serbie, en Suède, en Suisse, en Turquie et au Royaume-Uni) et six visites ad hoc pour examiner des questions spécifiques (en Albanie, en Belgique, en Bosnie-Herzégovine, en Géorgie, en Grèce et en Roumanie).