L´arbitrage international : Un domaine de spécialité méconnu des acteurs économiques du secteur des fruits et légumes

Décryptages
Outils
TAILLE DU TEXTE

fruits-legumesBenoît Renard, avocat admis aux barreaux de Paris et de Madrid, propose de promouvoir l´arbitrage international comme mode de résolution des litiges commerciaux pouvant survenir entre les différents acteurs économiques du secteur des fruits et légumes.

Ce dossier aborde une problématique réelle concernant l´Import/Export de fruits et légumes.Face au manque de formalisme juridique régnant dans le domaine, il convient d´envisager des moyens permettant d´anticiper et de prévenir au mieux les risques commerciaux. C´est pourquoi,  il propose de promouvoir l´arbitrage international comme mode de résolution des litiges commerciaux pouvant survenir entre les différents acteurs économiques du secteur des fruits et légumes.

fruits-legumesBenoît Renard, avocat admis aux barreaux de Paris et de Madrid, propose de promouvoir l´arbitrage international comme mode de résolution des litiges commerciaux pouvant survenir entre les différents acteurs économiques du secteur des fruits et légumes.

Ce dossier aborde une problématique réelle concernant l´Import/Export de fruits et légumes.Face au manque de formalisme juridique régnant dans le domaine, il convient d´envisager des moyens permettant d´anticiper et de prévenir au mieux les risques commerciaux. C´est pourquoi,  il propose de promouvoir l´arbitrage international comme mode de résolution des litiges commerciaux pouvant survenir entre les différents acteurs économiques du secteur des fruits et légumes.

I. L´absence de formalisme dans le secteur des fruits et légumes

I. L´absence de formalisme dans le secteur des fruits et légumes

L´Amérique du Sud étant un continent composé de pays exportateurs de fruits et légumes non seulement vers l´Europe mais également vers l´Asie et l´Amérique du Nord, d´aucuns pourraient penser que l´arbitrage internationale est monnaie-courante des litiges pouvant survenir entre exportateurs sud-américains et importateurs européens.

Force est constater que l´introduction d´une clause compromissoire dans un contrat de vente de fruits et légumes est rare dans le secteur des fruits et légumes. En effet, soucieux de pouvoir s´adapter rapidement aux exigences d´un marché nécessitant une réactivité forte, les acteurs économiques du secteur des fruits et légumes agissent en fondant leurs relations d´affaires sur une relation de confiance qui peut très vite mal tourner.

Ces relations d´affaires entre importateurs et exportateurs se concrétisent souvent de manière informelle à travers des échanges de correspondances électroniques ne récapitulant pas toujours clairement les conditions de l´accord projeté.

II. Les différents contrats pratiqués dans le secteur

II. Les différents contrats pratiqués dans le secteur

Malgré ce manque de formalisme flagrant, il est possible d´identifier que les contrats qui prédominent dans le domaine des fruits et légumes, sont les suivants :

- Contrat de vente à prix ferme : L´importateur s´engage à verser un prix convenu à l´avance en contrepartie duquel il deviendra propriétaire de la marchandise. Ce type de contrat est souvent privilégié par les grandes enseignes de distribution qui ont suffisamment de puissance d´achat afin d´imposer leurs conditions financières aux exportateurs. Pour ces derniers, cette modalité de vente n´est pas la plus rentable économiquement, mais elle a, néanmoins, le mérite de leur garantir une sécurité financière ;

- Contrat de vente à commission : Le commissionnaire (importateur) s´engage à vendre la marchandise du commettant (exportateur) au meilleur prix qu´il obtiendra sur le marché de Rungis par exemple. Par conséquent, il ne deviendra pas propriétaire des marchandises expédiées. Les ventes qu´il effectue lui donne généralement le droit à une commission équivalent à un taux de 8% du prix de vente du produit vendu. Même si le commissionnaire peut ne pas divulguer l´identité de sa clientèle au commettant étant donné qu´il s´agit d´informations confidentielles, il est, néanmoins, tenu, envers le commettant d´une obligation de reddition des comptes en vertu de laquelle il devra informer régulièrement le commettant de l´état d´avancement des ventes et des prix pratiqués sur le marché en lui transmettant, notamment, les comptes de vente correspondants à la marchandise vendue. Cette modalité de vente peut s´avérer très lucrative tant pour l´importateur qui ne prend pas le risque de devenir propriétaire des marchandises expédiés, que pour l´exportateur qui peut espérer recevoir plus de liquidités en fonction des prix du marché pratiqués.

- Contrat de vente à commission avec prix minimum garanti : Généralement, afin de pouvoir s´assurer un revenu minimum, le commettant exige un paiement d´un acompte sur le prix de la marchandise à vendre. Cette modalité lui permet, notamment, d´anticiper les couts et risques relatifs à l´investissement lié à l´expédition d´un nombre X de conteneurs de fruits et légumes vers un pays étranger.

III. Des marchandises, source de litiges commerciaux

III. Des marchandises, source de litiges commerciaux

Les fruits et légumes étant, par définition, des denrées périssables, des problèmes de vices cachés et de délivrance conforme peuvent se poser.

Concernant l´objet des litiges commerciaux entre exportateur et importateur, il s´agit souvent d´un problème ayant trait à la qualité de la marchandise expédiée. En effet, il est fréquent que des exportateurs peu scrupuleux expédie des marchandises de mauvaise qualité en ayant convenu préalablement un prix minimum garanti qui aura été préalablement versé par l´exportateur. A l´arrivée de la marchandise sur le territoire donnée, l´acheteur peut parfaitement recevoir une marchandise "invendable" ce qui lui engendrera inexorablement des pertes.

A l´inverse, il est également possible que des importateurs peu scrupuleux se prévalent de la "supposée" mauvaise qualité de la marchandise reçue afin de justifier un prix de vente moins élevé sur les comptes de vente qu´ils se doivent de transmettre régulièrement aux exportateurs en vertu de leurs obligations de reddition des comptes.
Dans l´une ou l´autre des hypothèses, les acteurs du secteur des fruits et légumes sont confrontés à une situation inconfortable au moment d´évaluer l´opportunité d´agir en justice. En effet, étant donné l´absence de contrat écrit, aucune clause attributive de juridiction n´est convenue par les parties.

Par conséquent, l´exportateur ou l´importateur doit donc, en principe, évaluer l´opportunité d´une action judiciaire en incluant dans la prémisse de son raisonnement que les tribunaux compétents seront ceux du ressort du domicile du défendeur. A supposer que l´importateur de raisins, gérant d´une société de droit français, doive faire face à un litige commercial avec un exportateur, lui-même, gérant d´une société de droit péruvien, il devra donc envisager l´option de faire appel à des conseils péruviens qui devront plaider sa cause devant les tribunaux nationaux. Sans préjuger de la qualité de la justice péruvienne, il y a fort à parier que les procédures devant ces tribunaux sont longues, et que la partialité des juges nationaux puisse prêter à discussion.

IV. L´idonéité d´insérer une clause compromissoire

IV. L´idonéité d´insérer une clause compromissoire

Face à cette situation inhibitrice au moment d´évaluer l´opportunité d´une action en justice visant à réparer un préjudice, il conviendrait bien évidemment que les acteurs des fruits et légumes puissent conclure des contrats écrits détaillés et précis. Toutefois, il parait illusoire de penser que, du jour au lendemain, cette pratique soit mise en place dans un secteur, étant historiquement, réticent à la contractualisation de leurs échanges commerciaux. En revanche, les relations commerciales étant principalement basées sur une relation de confiance, il pourrait être cohérent de suggérer aux acteurs d´anticiper et de prévenir les risques au moment de conclure leurs premières relations d´affaires avec un nouveau partenaire commercial. En effet, une clause compromissoire, en vertu de laquelle les parties s´engage à soumettre l´éventuelle différend devant une cour d´arbitrage, garantirait aux parties le prononcé d´une sentence relativement rapide non susceptible de recours (hormis le recours en annulation) rédigée et prononcée par des juges-arbitres indépendants, impartiaux et pleinement disponibles.

Il convient d´ajouter que la France accueille non seulement le siège mondial de la Chambre de Commerce Internationale, mais également le siège de la Chambre Arbitrale Internationale pour les Fruits et Légumes, produits frais et surgelés. Cette Chambre a pour but, notamment, "le règlement rapide et économique des litiges commerciaux pouvant survenir dans le commerce des fruits et légumes et primeurs frais et comestibles ainsi que les produits transformés"1. Cette chambre pourrait répondre aux attentes des acteurs du secteur qui reproche, notamment, aux juges nationaux de ne pas connaitre les caractéristiques du secteur des fruits et légumes de désigner des arbitres connaisseurs dès lors que l´article 5 du règlement de la Chambre Arbitrale Internationales des Fruits et Légumes dispose que « Les organisations professionnelles membres de la Chambre Arbitrale Internationale pour les Fruits et Légumes désignent pour chaque pays des arbitres parmi leurs adhérents. Ceux-ci sont inscrits sur la liste des arbitres. Le Président peut, s’il juge utile, déroger à cette règle. Les arbitres peuvent être de nationalité française ou de nationalité étrangère. Ils doivent jouir de la plénitude de leurs droits civils et exercer ou avoir exercé une fonction de responsabilité dans une organisation du secteur Fruits et Légumes ou une fonction de responsabilité commerciale ou juridique. Les Tribunaux arbitraux sont composés d’arbitres nommés suivant les modalités prévues au présent article.".

De plus, en termes de prix d´arbitrages, les coûts afférents à une procédure arbitrale sont véritablement transparents dès lors qu´ils sont publiés sur le site internet de la Chambre, à l´instar de la Chambre de Commerce Internationale. Contrairement à cette dernière, il semblerait, à la lecture du barème, que les frais à prévoir sont globalement plus abordables et permettent d´envisager sereinement l´opportunité d´une demande arbitrale lorsqu´il s´agit d´un litige visant, notamment, au recouvrement d´une créance d´un montant de petite quantité.

Par conséquent, il semblerait que l´introduction de clauses compromissoire peut répondre aux attentes des acteurs du secteur, et représenter la première étape vers une formalisation plus accrue des échanges commerciaux.

______________

NOTE

1. Préambule du Règlement de la Chambre Arbitrale Internationale pour les Fruits et Légumes. Consultable sur le lien suivant : http://www.arbitrage.org/admin/style/js/tinymce/uploaded/R%C3%A8glement%20Arbitrage%20CAIFL%202015_5.pdf

A propos de l'auteur


benoit-renardBenoît Renard, Avocat, Otero

Benoit Renard est un avocat français au Chili travaillant pour le Cabinet d´avocats Otero (www.otero.cl), partenaire de Granrut Avocats (www,granrut.com). Admis aux barreaux de Paris et de Madrid, il intervient aussi bien conseil qu´en contentieux sur des dossiers en français, en espagnol et en anglais.

 

 


Lex Inside du 26 avril 2024 :

Lex Inside du 23 avril 2024 :

Lex Inside du 18 avril 2024 :