Adoption de la Loi PACTE : les mesures à retenir pour doper l’investissement dans les entreprises

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Le 11 avril dernier, l’Assemblée Nationale a adopté le projet de loi PACTE dans lequel figure un important volet sur l’investissement dans les entreprises, notamment pour renforcer leurs fonds propres. Le point sur ce qui attend concrètement les entreprises mais aussi les épargnants.

Il y a plus d’un an que le projet de loi PACTE a été présenté. Malmené par deux fois au Sénat, avec pour cause principale, la mesure de privatisation des Aéroports de Paris, l’Assemblée Nationale a enfin adopté ce projet comprenant pas moins de 220 articles sur des sujets aussi divers que variés. 

Malgré son adoption, ce projet de loi reste très controversé. Un certain nombre de parlementaires ont d’ailleurs décidé d’intenter une procédure de référendum d’initiative partagée concernant la privatisation des Aéroports de Paris. 

Les mesures adoptées le 11 avril dernier s’appliquent notamment à modifier le fonctionnement des produits d’épargne (assurance-vie, PEA, PEA-PME, etc.) mais aussi à simplifier la vie des entreprises… 

Le PEA et le PEA-PME gagnent en attractivité 

Le fonctionnement du PEA et du PEA-PME a ainsi été revu pour favoriser son développement en y assouplissant certaines conditions. Tout d’abord, le plafond du PEA-PME, revu à la hausse, est désormais fixé à 225 000€ dans la mesure où les montants du PEA ne dépassent pas un certain seuil. De plus, il ne faudra plus attendre huit mais cinq ans pour pouvoir effectuer un retrait partiel de sommes ou de valeurs sans que celui-ci entraîne sa fermeture. De la même manière, le délai de huit ans est abaissé à cinq ans pour que les retraits avant cette date entraînent sa clôture. La création d’un « PEA jeunes » a également été adopté. Ce plan, dont le plafond est limité à 20 000 €, concernera les jeunes de 18 à 25 ans, rattachés au foyer fiscal de leurs parents. 

D’autres avancées sont également à souligner : le plafonnement des frais bancaires ainsi que de nouveaux outils éligibles au PEA-PME dont les titres participatifs, les minibons, les obligations à taux fixe. Il convient enfin de saluer le travail de l’Assemblée Nationale qui a  permis de réintégrer les titres de sociétés immobilières dans l’enveloppe des titres éligibles au PEA-PME. 

Des avancées qui restent encore timides 

En revanche, ces avancées ne sont pas sans contrepartie pour l’investisseur, notamment concernant le plafond de ses investissements. Il est désormais responsable du respect de ce plafond lorsque le PEA et le PEA-PME sont ouverts dans deux établissements différents ou lorsqu’est ouvert un « PEA jeunes ». Néanmoins, le législateur a souhaité instaurer un palliatif, obligeant ainsi les établissements auprès desquels les PEA sont ouverts, de notifier les titulaires lorsque le plafond risque d’être dépassé. Cette notification est également prévue, de manière plus classique, lors d’ouverture du plan.

Malgré ces belles avancées, certains titres restent en dehors du PEA notamment les bons de souscription ou d’acquisition. Ils ont été écartés des instruments éligibles au motif qu’ils offraient une trop grosse plus-value sans que celle-ci soit taxée. Un argument qui avait d’ailleurs été émis lors de l’examen de la loi de finances de 2014. Alors plutôt que d’exclure, pourquoi n’a-t-il pas été envisagé un plafonnement des plus-values, permettant ainsi un plus large éventail d’outils éligibles ? Surtout dans le cas de leur utilisation par les “capitalrisqueurs” pour financer les start-ups qui seront peut-être les licornes de demain. 

Pour finir, les modalités liées aux échanges de documents pour l’inscription de titres non cotés dans les PEA et PEA-PME restent toujours conditionnées par des LRAR (lettre recommandée avec accusé de réception). Les ralentissements des investissements ainsi que les craintes et lourdeurs régulières que subissent les investisseurs, vont donc perdurer encore un moment. 

Assurance-vie et épargne retraite : un pas vers plus de souplesse et de visibilité 

Le PEA-PME n’est pas le seul produit d’épargne à être impacté par l’adoption de la loi Pacte.
On peut, par exemple noter la relance des fonds euro-croissance et l’assouplissement du fonctionnement des assurances-vie. Toujours avec l’objectif de favoriser le renforcement des fonds propres des entreprises, la sortie en titres des assurances-vie souscrites en unités de compte est élargie au bénéficiaire du contrat lorsque le souscripteur a opté pour cette modalité de sortie. De plus, on peut souligner que les titres émis dans le cadre du financement
participatif pourront être intégrés dans les unités de compte, favorisant ainsi la circulation des titres non cotés. 

En revanche, il est à déplorer que le paiement de primes en titres n’ait pas été consacré, au grand dam de l’attractivité de la place financière française et au profit des contrats luxembourgeois qui autorisent ce mode de paiement.

Par ailleurs, bien que l’article R. 131-1 du Code des assurances liste les ratios d’encours du contrat d’assurance-vie que celui-ci doit respecter dès lors qu’il comporte des titres peu liquides, il reste encore aujourd’hui très difficile de se voir proposer par les assureurs des contrats “sur-mesure” où il serait possible de loger ce type de titres. Il serait intéressant à l’avenir de rendre transparentes les règles de choix, par les organismes d’assurances, des titres peu liquides qu’ils proposent dans les unités de compte.

Enfin, a été adoptée la mise en place d’un plan d’épargne retraite, sorte de socle commun des dispositifs d’épargne collective, qui devrait accroître la visibilité sur ces produits d’épargne. Parmi les mesures liées à ce socle commun de l’épargne retraite, se trouve la mise en place de la gestion “pilotée” comme mode de gestion par défaut. Une mesure qui devrait permettre de diriger, dans un premier temps, l’épargne vers les actions.

Ces mesures, bénéfiques pour l’économie françaises ne seront malheureusement pas appliquées avant début 2020, nécessitant de lourds processus de mise en place. Sans oublier que la loi Pacte est actuellement examinée par le Conseil Constitutionnel. Il faudra donc s’armer de patience avant de pouvoir bénéficier des premières retombées positives de ce projet titanesque.

Martin Kruczkowski, juriste, Utocat


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