Maintien de l’uniformisation de la procédure devant les juridictions pénale et civile

Décryptages
Outils
TAILLE DU TEXTE

eric andrieuEric Andrieu, Associé au cabinet Péchenard & associés, nous explique la décision de l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation du 15 février 2013 qui réaffirme le principe de l’uniformisation du procès de presse.

Par un arrêt du 15 février 2013, l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation a réaffirmé le principe selon lequel les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse s’appliquent aux actions engagées devant la juridiction civile.

Une décision extrêmement importante et attendue qui vise à réaffirmer le principe de l’uniformisation du procès de presse et la prééminence de la loi de 1881. Rappel des faits et explications par le cabinet Péchenard & associés, représentant d’Aufeminin.com, partie prenante de l’affaire.

Sur le fond, une affaire somme toute banale : une internaute a publié sur le forum d'Aufeminin.com des propos mettant en cause le Docteur Debray et sa clinique de soins esthétiques. Ces deux derniers avaient poursuivi le site ainsi que l'auteur des propos devant le Tribunal de grande instance en matière civile, et ce à la fois pour injure et pour diffamation.

Le cabinet Péchenard & associés, représentant d’Aufeminin.com, a soutenu devant le juge de la mise en état la nullité de l'assignation en raison essentiellement de ce que les demandeurs visaient des propos identiques ou à peu près identiques à la fois en tant qu'injure et en tant que diffamation, ce qui était contraire aux dispositions de l'article 53 de la loi de 1881.

Conformément à la jurisprudence habituelle, le juge de la mise en état, puis la Cour d'appel, ont donné raison au site.
Monsieur Debray et la Clinique ont alors formé un pourvoi en cassation et la 1ère Chambre Civile a cassé l'arrêt de la Cour d'appel par un arrêt du 8 avril 2010 qui a été très commenté dans la mesure où il revenait sur le principe de l'uniformisation du procès de presse, 

c'est-à-dire le principe au terme duquel les mêmes règles sont applicables que le procès soit engagé devant les juridictions civiles ou devant les juridictions pénales.

La Cour d’appel de renvoi a à nouveau statué en faveur d’Aufeminin.com et l'affaire est venue devant l'Assemblée Plénière de la Cour de Cassation.

La position de la Cour de Cassation est très nette :

"Mais attendu que selon l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 qui doit recevoir application devant la juridiction civile, l'assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable; qu'est nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d'injure et de diffamation";

"Et attendu qu'ayant constaté que des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes, la Cour d'appel en a déduit, à bon droit, sans encourir les griefs du moyen, que ce cumul de qualifications étant de nature à créer pour les défenderesses une incertitude préjudiciable à leur défense, l'assignation était nulle en son entier."

Il convient de noter que la Cour de Cassation a publié un communiqué spécifiquement pour annoncer cet arrêt, ce qui montre l'intérêt particulier qu'elle lui porte.

En effet, cette décision était extrêmement attendue par l'ensemble des confrères et commentateurs s'intéressant aux procès de presse dans leur aspect technique car l'arrêt de la 1ère Chambre Civile avait ouvert une brèche sérieuse dans l'exercice des droits de la défense dans le domaine de la presse en matière civile.

La prise de position de la Cour de Cassation reprend ainsi le fil traditionnel de la jurisprudence depuis maintenant plus de 20 ans, le précédent arrêt de la 1ère Chambre Civile devenant un simple incident et n'étant pas appelé à avoir de suites.

 

Eric Andrieu, Associé au cabinet Péchenard & associés


Lex Inside du 2 mai 2024 :

Lex Inside du 26 avril 2024 :

Lex Inside du 23 avril 2024 :