Le nombre de personnes faisant l'objet de sanctions et mesures en milieu ouvert, c'est-à-dire qui maintiennent les auteurs d’infractions dans la collectivité, sans privation de liberté, a augmenté de 3 % en Europe de 2019 à 2020, selon l'enquête annuelle SPACE II 2020 réalisée par l'Université de Lausanne pour le Conseil de l'Europe (voir aussi les principales constatations).
En effet, d’après les données fournies par 29 services de probation qui utilisent la personne comme unité de compte (certaines administrations utilisent d'autres indicateurs, comme le nombre de cas ou de dossiers), le nombre d’individus concernés est passé de 1 456 192 en 2019 à 1 500 547 en 2020. Cette augmentation reflète la poursuite d'une tendance au développement en Europe des sanctions et mesures en milieu ouvert, y compris la surveillance électronique, le travail d´intérêt général, l´assignation à résidence, les traitements, la semi-liberté ou la libération conditionnelle.
Si on examine les 38 administrations de probation qui ont fourni des données pour 2019 et 2020, la tendance se confirme : plus de la moitié d’entre elles (22) ont constaté une augmentation. Dix pays ont enregistré des hausses importantes : la Serbie (34 %), l’Azerbaïdjan (27 %), l’Espagne (Administration d'État) (15 %), la Slovénie (13 %), l’Irlande (11 %), l’Italie (10 %), la Lituanie (8,6 %), la Belgique (7,5 %), la Norvège (7,3 %) et la Turquie (6,1 %). À l'inverse, huit autres ont enregistré des baisses notables : l’Arménie (-47 %), la Bulgarie (-22 %), la Grèce (-15 %), Monaco (-14 %), la Lettonie (-8,2 %), l’Estonie (-7,4 %) et la Suisse (-5,8 %).
Au 31 janvier 2020, on dénombrait en Europe 149 personnes en probation pour 100 000 habitants contre 103 personnes incarcérées pour 100 000 habitants. Les administrations ayant les taux de probation les plus élevés étaient celles de la Pologne (643 personnes pour 100 000 habitants), de la Turquie (627), de la Lituanie (568) et de la Géorgie (562). Les administrations ayant les taux de probation les plus faibles sont celles de deux pays qui ont commencé à recourir aux sanctions et mesures en milieu ouvert pendant la dernière décennie : la Macédoine du Nord (6 personnes en probation pour 100 000 habitants) et la Serbie (35), suivies de la Suisse (47), Norvège (49), la Finlande (54) et la Bulgarie (56).
Dans 34 des 40 administrations pénitentiaires et de probation qui ont fourni des données, le taux de probation était supérieur au taux d'incarcération. Les exceptions étaient la Macédoine du Nord, la Serbie, la Suisse, la Norvège, la Bulgarie et l'Azerbaïdjan, où le taux d'incarcération était plus élevé que le taux de probation pour 100 000 habitants.
Si on examine le ratio entre la population en probation et la population carcérale, on constate que huit pays avaient de faibles taux pour ces deux éléments (Suisse, Norvège, Finlande, Islande, Slovénie, Croatie, Monaco et Chypre).
La Géorgie, la Lituanie et la Turquie se trouvaient dans la situation inverse : elles avaient des taux d'incarcération et de probation extrêmement élevés (tous deux supérieurs à la médiane européenne), ce qui pourrait signifier que les sanctions et mesures en milieu ouvert sont utilisées non pas comme des alternatives à l'emprisonnement mais comme des sanctions supplémentaires. Cela pourrait également s'appliquer à un certain nombre de pays ayant un taux de probation élevé et un taux d'incarcération relativement élevé (République tchèque, Slovaquie, France, Royaume-Uni (Angleterre et pays de Galles), Lettonie, République de Moldova, Portugal, Estonie, Roumanie, Royaume-Uni (Écosse) et Pologne).
En moyenne, 11 % des personnes en probation étaient des femmes, soit plus du double de la proportion de femmes dans la population carcérale (5 %) dans les 33 services qui ont fourni des données sur l’incarcération et la probation.
Les étrangers représentaient 6,7 % des personnes en probation, soit une proportion plus faible que dans la population carcérale (17 %) dans les 22 services qui ont fourni des données sur les étrangers incarcérés et les étrangers en probation. « Cette différence est due au moins en partie au fait qu'il est plus difficile pour un étranger de satisfaire aux conditions requises pour être placé sous probation, souvent parce qu'il n'a pas d'adresse stable dans le pays. Il est également plausible que certains étrangers incarcérés soient renvoyés après avoir purgé leur peine d'emprisonnement et ne se voient pas offrir la possibilité d'être placés sous probation », a déclaré le chef de l'équipe de recherche SPACE, le professeur Marcelo Aebi, de l'École des sciences criminelles de l'Université de Lausanne, en Suisse.