Lettre de solidarité à Ghislaine et à Claude

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redaction acteSerge Bakoa, avocat au Barreau de Paris et Chevalier de l’Ordre du Mérite Camerounais nous livre un article à la mémoire Ghislaine Dupont et Claude Verlon, journalistes de RFI qui ont été enlevés à Kidal (Mali), puis exécutés.

Ils vous ont assassiné, mais mort, où est ta victoire ?

Ghislaine et Claude, n’êtes vous vraiment plus de ce monde ?

Sous les ors des Républiques malienne et française, les Présidents ont chanté vos louanges, omettant de dire qu’au delà de la mort, il y a l’immortalité.

Ce que ne savaient pas les seigneurs de guerre et autres reitres du désert, c’est que s’élèverait des peuples d’Afrique une lame de fond portant jusqu’au plus haut des cieux les inscriptions:

Mémoire et fidélité.

L’Afrique gardera à jamais le souvenir de Ghislaine, la mère Courage.

Il en est de même pour toi, Claude, père Courage.

Car le devoir de mémoire que nous invoquons ainsi puise aux sources de l’éthique africaine.

Pour vous qui, comme beaucoup d’autres d’Afrique ou d’ailleurs, avez fait le sacrifice de vos vies, afin que fleurisse à jamais la liberté de la presse en terre africaine et dans le reste du monde, nous rappelons à nouveau les principes de l’éthique africaine.

Dans tes voyages au bout de l’Afrique, dans tous ces pays africains que tu connaissais si bien, nous savons, Ghislaine, que ton premier contact avec l’Afrique noire eut lieu au Sénégal.

Un proverbe de ce pays résume le lien qui nous unit à vous, Ghislaine et Claude:

"Si tu as été noble avec moi, tu ne seras
jamais plus autre que moi". 

Nous ne vous oublierons jamais.

Invoquer un devoir de mémoire implique en conséquence de notre part, une fidélité immarcescible.

Il est temps que nous agissions, sœur et frère humains.

Votre mort nous interpelle.

A notre tour, nous interpellons les peuples d’Afrique et d’ailleurs, pour que la liberté de la presse, les droits humains, la force des valeurs de courage prédominent, que la vérité et la vie triomphent sur l’erreur et la mort.

Allons-nous demeurer impassibles devant le décès de deux journalistes, et tant d’autres africains ou européens, porteurs du flambeau de l’Humanisme Universel ?

Monsieur le Président du Mali, vous avez décoré à titre posthume Ghislaine et Claude, plaiderez vous auprès de vos collègues d’Afrique pour qu’ils fassent de même ?

Et en ces temps du souvenir de la guerre à la guerre, et de la "der des ders", Monsieur le Président de la République française, au seuil du centenaire de la guerre de 1914, où de nombreux tirailleurs africains ont pris part, ferez vous de même?

Francophonie du deuil. ..

Ô Musset, que de fois avons nous murmuré :

"Les plus désespérés sont les chants les plus beaux.
Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots". 

Mais en cette circonstance, laissez nous retourner à nos racines pour dire avec notre grand poète Birago Diop,

"Les morts ne sont jamais partis.
Ils sont dans l’ombre qui s’éclaircit…
Les morts ne sont pas sous terre ?
Ils sont dans l’arbre qui frémit". 

Notre propos ne peut s’achever sans que nous adressions nos condoléances aux familles éplorées de Ghislaine, Claude.

Puissent-elles trouver dans ce plaidoyer un peu de réconfort !

Puissent-elles y trouver la marque de la solidarité indéfectible que les africains ont pour Ghislaine, Claude, et tous les autres anonymes, d’Afrique ou d’ailleurs, ayant donné leur vie pour le triomphe des droits humains.

Serge Bakoa
Avocat au Barreau de Paris
Chevalier de l’Ordre du Mérite Camerounais
Au nom d’un groupe d’avocats africains des barreaux de France et signataires de cette lettre.


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