Le cabinet d'avocats VIGO est aux côtés de Reporters sans frontières pour défendre la liberté d’expression en publiant un argumentaire juridique pour contester le délit d'apologie du terrorisme.
Inquiète des conséquences pour la liberté d'information du transfert vers le code pénal du délit d'apologie du terrorisme, Reporters sans frontières (RSF) appelle à contester la constitutionnalité de ce délit comme le permet la procédure de Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC). L'organisation publie un argumentaire juridique en collaboration avec le cabinet Vigo.
Les attentats des 7, 8 et 9 janvier 2015 ont entraîné une multiplication des poursuites pour apologie du terrorisme sous l'impulsion du ministère de la Justice, qui a demandé aux parquets, dans un circulaire, d'être "particulièrement réactifs et fermes lorsque les propos ou les écrits sont de nature raciste, antisémite ou tendent à provoquer des comportements haineux, violents, discriminatoires ou terroristes".
Dans un tel contexte, RSF s'inquiète qu'une confusion entre un travail d'information du public et des propos légitimement condamnables conduise à des poursuites abusives contre des journalistes, professionnels ou amateurs. Notamment parce que les délits de provocation aux actes de terrorisme et d'apologie au terrorisme ne relèvent plus du régime protecteur de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
La loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions de lutte contre le terrorisme a en effet sorti ces délits du champ de la loi de 1881 pour les inclure dans le code pénal. La diffusion de ces propos par Internet est devenue une circonstance aggravante.
RSF avait souligné tant au moment de la présentation du projet de loi devant le Conseil des ministres que lors de l’élaboration de ce projet de loi que ces dispositions pouvaient représenter un danger pour la liberté d’expression et d’information, pour le secret des sources et le droit à la vie privée des acteurs de l’information.
En cas de poursuites pour “apologie du terrorisme”, des techniques spéciales d’enquête peuvent désormais être mises en oeuvre. Le glissement de la loi de 1881 vers le code pénal permet en effet d’appliquer aux infractions de provocation et d’apologie du terrorisme les règles de procédure applicables en matière de terrorisme, et notamment les techniques spéciales d’enquête telles que la surveillance, l’infiltration, les écoutes, les sonorisations et fixation d’images, la captation de données informatiques.
Dans son avis du 25 septembre 2014, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a critiqué cette disposition du projet de loi en soulignant que “l’apologie publique du terrorisme, [...] doit continuer à relever des dispositions spécifiques du droit de la presse” et que “la provocation publique non suivie d’effet doit demeurer dans la loi du 29 juillet 1881”.
RSF appelle à contester par la voie d’une QPC l’article 5 de la loi. La procédure de QPC, introduite par la révision constitutionnelle de juillet 2008, permet à toute partie à un procès en cours de contester la conformité à la Constitution d’une disposition législative.