Davy Sarre, Juriste chez LLC et Associé au Bureau de Lyon, nous livre une analyse sur les autorisations verbales d’occupation du domaine public.
Aucune disposition législative ou réglementaire n’impose qu’une autorisation d’occuper le domaine public soit écrite. Il est donc possible pour l’administration de délivrer verbalement de telles autorisations (CAA Marseille, 18 décembre 2012, M. Suzzarini, N°11MA00981).
Afin de protéger la plage de l’érosion, l’exploitant d’un camping se trouvant en bordure de plage a fait installer, au début de l’année 2008, sur le domaine public maritime un dispositif, dit « stabiplage ». Ce dispositif consistait en la pose d’un textile en forme de boudin, rempli de sable, d’environ 30 m de long, immergé perpendiculairement à la côte.
Par courrier du 27 octobre 2008, le propriétaire d’un bien se trouvant en bordure d’une autre plage de la commune, a mis en demeure le Préfet de Haute-Corse de dresser un procès-verbal de contravention de grande voirie à l’encontre du gérant du camping.
Un refus fut opposé à sa demande par décision en date du 2 février 2009.
L’administration avait alors justifié son rejet par le fait que la pose du « stabiplage » permettait à l’exploitant du camping d’assurer la continuité de son activité économique sans pour autant que le dispositif mis en place porte atteinte à l’intégrité du domaine public maritime.
Jugeant ce motif contraire au principe de protection du domaine public et aux obligations en matière de police pesant sur le Préfet, le Tribunal administratif de Marseille annula la décision attaquée par un jugement en date du 27 janvier 2011.
En appel, la préfecture a entendu se prévaloir d‘un autre motif que celui mentionné dans la décision litigieuse. Ce dernier était tiré de ce que l’administration avait donné à l’exploitant du camping une autorisation verbale de se servir à titre expérimentale du dispositif « stabiplage ».
Après avoir rappelé les dispositions de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, la Cour administrative de Marseille a pu indiquer qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose que les autorisations d’occupation du domaine public soient délivrées sous forme écrite.
L’administration ayant mise à même le propriétaire voisin du dispositif de former ses observations à l’encontre de ce nouveau motif, qui est de nature à fonder légalement le refus de dresser un procès-verbal de contravention de grande voirie, cette dernière était donc fondée à solliciter du juge une substitution de motif de la décision litigieuse.
Après avoir écarté l’ensemble des autres moyens soulevés en défense, les juges d’appel marseillais ont pu annuler le jugement attaqué qui avait irrégulièrement retenu qu’aucune autorisation administrative d’occupation du domaine public maritime n’avait été délivrée à l’exploitant du camping.
Cette décision s’inscrit dans la veine jurisprudentielle de l’arrêt Epoux Bertin du Conseil d’Etat (CE, 20 avril 1956, Epoux Bertin, N°98637) dans lequel ce dernier avait reconnu la possibilité à l’administration de conclure verbalement des contrats administratifs et des décisions administratives verbales (pour un exemple récent CE, 7 janvier 2013, M. Roche, n°358781).
Références :
• CAA Marseille, 18 décembre 2012, M. Suzzarini, N°11MA00981
• CE, 20 avril 1956, Epoux Bertin, N°98637
• CE, 7 janvier 2013, M. Roche, n°358781
• Article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques
Davy SARRE, Juriste chez LLC et Associé au Bureau de Lyon