L’objectif Zéro Artificialisation Nette, ci-après « ZAN », est défini à l’action 10 du plan biodiversité dévoilé par le gouvernement le 4 juillet 2018 et a été consacré par la convention citoyenne sur le climat en 2020, qui a notamment débouchée sur la promulgation de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
La loi climat et résilience fixe un objectif d’atteindre en 2050 l’absence de toute artificialisation nette des sols avec un premier objectif intermédiaire de réduction de moitié du rythme de la consommation d’espace dans les 10 prochaines années (2021 – 2031).
Il s’agit d’agir au niveau des territoires pour réduire l’artificialisation progressive des sols tout en tenant compte du contexte local, de la dynamique démographique et économique ainsi que du besoin de revitalisation ou de désenclavement des territoires. L’exercice est difficile puisqu’il s’agit de concilier les objectifs de diverses politiques publiques, dont celle du logement, avec celle du ZAN.
Deux premiers décrets d’application de la loi climat et résilience pour la mise en œuvre de l’objectif ZAN ont été publiés le 29 avril 2022.
Compte tenu des contraintes que ces décrets imposent au niveau des collectivités territoriales, l’Association des Maires de France (AMF) a formé un recours.
A la suite de ces recours, le gouvernement a annoncé « des ajustements aux décrets » afin de tenir compte des spécificités territoriales.
Parallèlement, une proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de ZAN a été adoptée par le Sénat le 16 mars 2023 en première lecture. Le texte est désormais transmis pour examen à l’Assemblée nationale.
C’est dans ce contexte que deux nouveaux projets de décrets ont été soumis à la consultation publique le 13 juin 2023 et jusqu’au 3 juillet 2023.
Voici les principales mesures de ces deux projets de décrets :
- Le projet de décret relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols:
Pour rappel, le précédent décret prévoyait que les règles de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols devaient être déclinées dans le Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable et d’Egalité des Territoires (SRADDET).
C’est toujours le cas dans le nouveau projet de décret qui modifie les objectifs du SRADDET et prévoit notamment qu’il devra prendre en considération les efforts passés et les spécificités locales.
Par ailleurs, ce projet de décret supprime l’obligation de fixer une cible chiffrée d’artificialisation à l’échelle infrarégionale dans les règles générales du SRADDET.
Il s’agit d’avoir une approche plus proportionnée et qualitative du rôle de la région et de ne pas conduire à contraindre de façon excessive les documents infrarégionaux.
Enfin, l’un des points importants du projet de décret est que les communes rurales doivent pouvoir avoir la garantie de pouvoir disposer d’une surface minimale de développement, les objectifs du ZAN ne peuvent pas avoir pour effet de priver une commune peu dense ou très peu dense d’une capacité de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers en deçà d’une surface minimale de développement communal tant au niveau du SRADDET que du Schéma de Cohérence Territorial (SCOT).
Le gouvernement s’est déjà déclaré favorable à une enveloppe minimale d’artificialisation équivalente à 1 % de la surface urbanisée des communes rurales peu denses, soit environ 20 000 hectares, contre 36 000 hectares souhaités dans la loi Zéro Artificialisation des Sols défendue par les sénateurs (la proposition de loi a été adoptée le mardi 27 juin 2023 à l’Assemblée Nationale).
- Le projet de décret relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols
L’objet de ce décret est de fixer la nomenclature des sols artificialisés, c’est-à-dire la définition des types d’espaces pour le calcul du ZAN.
Une nouvelle nomenclature est ainsi annexée au projet de décret remplaçant celle du décret précédent. Elle prévoit des seuils de référence à partir desquels pourront être qualifiés les surfaces artificialisées (50 m² d’emprise au sol pour le bâti et 2 500 m² pour les autres catégories de surfaces ; 5 mètres de large pour les infrastructures linéaires et au moins 25 % pour le boisement d’une surface végétalisée pour qu’elle ne soit pas considérée comme herbacée).
Cette nomenclature ne concerne toutefois que l’objectif ZAN à l’horizon 2050 et non l’objectif intermédiaire de réduction de moitié du rythme de consommation d’espaces d’ici à 2031. Le texte prévoyant « pendant cette période transitoire de 2021 à 2031, les objectifs porteront uniquement sur la réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (entendus comme la création et l’extension effective d’espaces urbanisés) ».
La consultation sur ces deux projets de décrets prend fin aujourd'hui.
Fahima Gasmi et Philippe Mathurin, avocats associés au cabinet Alerion