Prix de l’énergie : la fin du « quoi qu’il en coute » marqué par le retour des taxes énergétiques !

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Même s’il a été possible de constater une diminution du prix de l’énergie sur les marchés ces dernières semaines, ceux-ci n’ont pas retrouvé leur niveau d’avant crise sanitaire. En dépit de cela, le Gouvernement est bien décidé à sortir le plus rapidement possible du « quoi qu’il en coute » énergétique qu’il a mis en place début 2022 dans le contexte du déclenchement de la guerre en Ukraine. Retour et perspective sur le sujet par Matthieu Toret, associé au cabinet Enerlex.

Les dispositifs de réduction de la facture vont progressivement disparaitre  

La reprise post crise sanitaire, suivie du déclenchement du conflit entre l’Ukraine et la Russie, ont formé un cocktail ayant entrainé une explosion des prix de l’énergie, bouleversant totalement le modèle économique des entreprises dont l’activité est énergivore. Cette catégorie a été médiatisée, sur les plateaux télés, par les Fédérations professionnelles des artisans-boulangers ayant, pour certains, vu leurs factures d’électricité multiplier par 10 ; réouvrant le sujet du prix de la baguette de pain et la crainte d’une inflation galopante. 

Rapidement, les premiers ministres, Jean Castex et Elisabeth Borne ont réagi pour, autant que possible, atténuer la douloureuse énergétique.

D’abord, il a été décidé d’abaisser le tarif de la principale taxe pesant sur l’électricité, la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE, ex. CSPE). Pour mémoire, le tarif historique de cette taxe varie de 22,5 et 36,06 euros par MWh (en fonction de la puissance de raccordement du consommateur). Dès le 28 janvier 2022, les tarifs de la TICFE a été diminué au maximum de ce qu’autorise le droit européen (0,5 euro par MWh d’électricité livré aux entreprises et 1 euro par MWh d’électricité livré aux ménages et aux très petites entreprises). Cette mesure incarne à elle seule le « quoi qu’il en coute » énergétique, puisque son coût pour les finances est de l’ordre de 7 à 9 milliards d’euros !   

Puis, il a été mis en place une procédure de remboursement permettant aux entreprises énergivores d’obtenir le remboursement partiel de leurs factures de gaz et d’électricité, mais dont les critères initiaux étaient tellement restrictifs que presque aucune entreprise n’y était éligible. Rapidement, les Services de Bruno LE MAIRE ont corrigé leur copie, et assoupli le dispositif, qui désormais fonctionne bien. Peut obtenir le remboursement partiel de ses factures d’électricité, de gaz, de froid et de chaleur, l’entreprise qui démontre : 

1) que son prix d’achat a augmenté d’au moins 50% par rapport à la moyenne constatée en 2021 (critère facile à remplir) 

2) que sa facture énergétique actuelle représente au moins 3% de son chiffre d’affaires 2021 proratisé (critère moins facile à remplir).  

Enfin, est arrivé l’amortisseur sur l’électricité. Ce dispositif consiste, pour l’Etat, à prendre directement en charge la moitié de la partie du prix d’achat de l’électricité excédant 180 € le MWh. Ce mécanisme bénéficie à l’ensemble des PME, des collectivités, des associations et des établissements publics. Une simple attestation remise à son fournisseur suffit pour en bénéficier. 

L’ensemble de ces mesures ont été désignées sous l’expression « bouclier énergétique », dont l’année 2024 marquera le clap de fin.  

Clap de fin et hausse des taxes énergétiques en 2024  

À l’exception de l’amortisseur sur l’électricité, les dispositifs décrits plus haut ne sont pas reconduits en 2024. 

D’abord, les factures des entreprises intensives en énergie émises en 2024 ne feront plus l’objet d’un remboursement partiel. Toutefois, les entreprises ont jusqu’au 30 avril 2024 pour déposer leurs demandes de remboursement portant sur les factures émises en 2023 (sous certaines conditions très strictement appréciées par l’administration chargée d’instruire les demandes).

Dans le même sens, le Gouvernement a annoncé la fin de la baisse exceptionnelle du tarif de la TICFE, qui dans les prochains jours devrait augmenter dans des proportions encore inconnues. L’ancien du budget Thomas Cazenave ayant toutefois précisé, fin 2023 que « Il me semble plus raisonnable d’augmenter progressivement la fiscalité sur l’électricité (de 1 à 15 euros par MWh donc, dans un premier temps), sans dépasser une hausse de 10 % des tarifs, conformément à l’engagement que nous avons pris ». Dans la mesure où, les tarifs historiques de cette taxe étaient compris entre 22,5 et plus de 32 euros, il est donc encore possible de voir le verre à moitié plein de la baisse et non de la hausse des tarifs…

En revanche, cet optimisme n’est pas faisable en matière de gaz naturel qui supporte, à l’instar de l’électricité, une taxe de consommation, dont le tarif vient de doubler.  Pour rappel, le tarif 2023 de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) était de 8,37 euros par MWh de gaz à usage combustible et de 5,23 euros de gaz à usage carburant. Par arrêté pris le 29 décembre 2023, le tarif de l’accise sur le gaz à usage combustible a été porté à 16,37 euros, avec effet au 1er janvier 2024. La lecture de la loi finances pour 2024 permet de constater que les autorités justifient cette hausse par des considérations environnementale, le gaz étant une énergie fortement émettrice de gaz à effet de serre.

Matthieu Toret, associé au cabinet Enerlex


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