L’abdication du désormais précédent Roi d’Espagne Don Juan Carlos Ier en faveur de son fils Felipe VI, ne règle pas totalement la question de la succession de la famille royale espagnole.
La branche d’Anjou, dite en Espagne de Bourbon, est issue de Philippe de France, Duc d’Anjou, petit-fils de Louis XIV, proclamé en 1700 Roi d’Espagne sous le nom de Philippe V.
Les Bourbons d’Espagne ont régné de 1700 à 1808, de 1814 à 1868, de 1875 à 1931 et règnent à nouveau depuis 1975 avec Juan Carlos Ier (1975-2014) puis aujourd’hui Felipe VI.
En 1830, le Roi Fernando VII abrogea la loi salique, privilégiant la primogéniture par les mâles dans l’ordre de succession à la couronne dans la même ligne et le même degré, en promulguant la pragmatique sanction, ce qui faisait de sa fille Isabel son héritière et excluait du trône son frère Carlos, mais mena ainsi le pays à la première guerre carliste (1833-1846).
Lors de son discours d’investiture en 2004, l’ancien Président du Conseil des Ministres, José Luiz Rodriguez Zapatero, avait relancé le débat national sur la nécessité et l'urgence d'une révision de l'article 57-1 de la Constitution espagnole, survivance de la loi salique.
L’accession au trône de Felipe VI, tempère le débat, sans l'éclipser totalement et permet de gagner du temps, mais ne résout pas le problème de fond, car si Léonor, nouvelle Princesse des Asturies, titre que portent les prétendants au trône espagnol, renonçait à ses droits dynastiques ou en était empêchée, la naissance postérieure d'un héritier en bouleversant l’ordre de succession, la priverait du droit d'être un jour Reine d'Espagne.
Tant le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE) que les conservateurs du Parti Populaire (PP) de l’actuel Chef du Gouvernement Mariano Rajoy, les deux principaux partis favorables à la monarchie, admettent le bien-fondé d'un amendement de la Constitution.
Néanmoins, toute modification de la Carta Magna touchant la Couronne bouleversera le cadre politique car son approbation à la majorité des deux tiers de chacune des deux chambres doit en effet obligatoirement être suivie de la convocation d'élections législatives et les nouveaux députés et sénateurs devront approuver à leur tour la révision constitutionnelle.
Cette dernière, serait enfin soumise à un référendum national, avec le risque qu'il ne dérive en référendum sur la monarchie, dans un pays où elle reste le seul lien d’un peuple désuni, en proie aux dérives des apprentis-sorciers indépendantistes et désarmé face à la crise.
Jean Marc SÁNCHEZ, avocat aux Barreaux de Paris et Madrid, responsable du Desk Espagne DS avocats et de la Commission franco-espagnole du Barreau de Paris