Particuliers : que faire de votre résidence secondaire ?

Décryptages
Outils
TAILLE DU TEXTE

Denis Di Leonardo - Avocat - DLSI AvocatsLa Loi de Finances Rectificative double la durée de détention nécessaire pour bénéficier d’une exonération des plus-values immobilières, hors résidence principale. Dès lors, de nombreux particuliers s’interrogent sur l’opportunité de garder leur résidence secondaire. L’afflux de biens à vendre engendré par l’annonce du plan de rigueur tend ainsi à fausser le marché de l’immobilier et risque de faire chuter les prix. 

La réforme sur les plus-values immobilières est une des mesures phares du plan de rigueur instauré par le Gouvernement.

Aujourd’hui, les plus-values immobilières imposables sur la vente d’une résidence secondaire, c’est-à-dire celles qui correspondent à la différence entre le prix de revient et le prix de vente, bénéficient d’un abattement de 10% par an au-delà de la 5e année de détention. Ces plus-values sont donc totalement exonérées d’impôt sur le revenu (19%) et de prélèvements sociaux (12,3% portés à 13,5%) au bout de quinze années de détention.

Le nouveau dispositif, adopté par la Loi de Finances Rectificative pour 2011, double la durée de détention nécessaire pour bénéficier d’une exonération des plus-values immobilières (toujours hors résidence principale). Pour les cessions réalisées à compter du 1er février 2012, il faudra une détention de trente ans pour exonérer de toute imposition la plus-value réalisée. 

Ainsi aujourd’hui, si un particulier vend un bien immobilier (hors résidence principale) détenu depuis quinze ans, il est exonéré. Demain, il sera imposé sur 80% de la plus-value ; et pour obtenir un abattement supérieur à 50%, il faudra attendre la 24e année de détention avant de vendre.

De nombreux particuliers détenteurs d’une résidence secondaire se demandent donc ce qu’ils doivent en faire, et quand.
Comme toujours lors de décisions lourdes de conséquences, il convient avant tout d’analyser sa propre situation et de ne pas se précipiter ! D’autant qu’une acquisition ou une cession immobilières sont souvent liées à un projet de vie et à des aspects de transmission familiale.

Si le bien est détenu depuis moins de 5 ans, la disparition de l’abattement fixe de 1 000 euros et l’alourdissement des prélèvements sociaux rendent les conditions, depuis la parution de la Loi, nettement moins favorables qu’auparavant.
Si le bien est détenu depuis plus de 15 ans et moins de 30 ans, que la plus-value est importante et que le particulier avait déjà l’intention de vendre, autant le faire au plus vite. L’intégralité de la plus-value sera exonérée.

Il n’est donc pas systématiquement nécessaire de vendre son bien avant la mise en place de la réforme.
Compte tenu du délai - environ trois mois - requis entre la signature de la promesse de vente et l'acte définitif, les propriétaires n’ont plus beaucoup de temps pour trouver un acquéreur et bénéficier du régime favorable actuel. Et pour ce faire, ils devront rendre leur prix attractif… dès lors, vendre rapidement quitte à céder à un prix moindre que celui escompté ou tomber sous le joug d'une plus forte taxation des plus-values, c’est devoir choisir entre les deux maux, le moindre!

On remarque d’ailleurs que l’annonce du plan de rigueur du Gouvernement est en train de fausser le marché de l’immobilier, le nombre de biens à vendre étant supérieur aux demandes.

Le sujet n’est d’ailleurs pas définitivement clos. Les députés ont adopté, dans le projet de Loi de Finances pour 2012, une disposition permettant aux propriétaires de résidence secondaire, s’ils ne sont pas propriétaires de leur résidence principale, d’être exonérés de plus-value immobilière en cas de cession de leur résidence secondaire, sous condition de remploi et sous réserve de respecter certaines conditions :

  • il doit s’agir de la première cession d’un logement et de ses dépendances immédiates et nécessaires ;
  • le cédant ne doit pas avoir été propriétaire de sa résidence principale (directement ou par personne interposée) au cours des quatre années précédant la cession ;
  • le cédant doit remployer le prix de cession, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de cette dernière, à l’acquisition ou la construction d’un logement qu’il affecte, dès son achèvement ou son acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale.

Cette disposition doit encore être débattue au Sénat et pourrait donc se trouver encore modifiée...

Dans ce contexte contraignant et incertain, les propriétaires immobiliers s’interrogent sur les autres moyens éventuels d’échapper à la réforme sur les plus-values immobilières, par exemple via une donation, une SCI, etc.

Pour ceux qui espéraient contourner la réforme en apportant rapidement leurs biens à une SCI - ils auraient alors bénéficié de l’abattement pour durée de détention au moment de cet apport - le gouvernement a pris une mesure anti-abus en soumettant immédiatement les apports au nouveau régime.
Toutefois, la cession (et non plus l’apport) du bien à une SCI familiale qui le louerait permet toujours, jusqu’au 1er février 2012, de bénéficier de l’abattement de quinze années. Encore faut-il se montrer très attentif lors du « montage » pour éviter toute requalification en abus de droit : âge des enfants à associer ; saisine du Juge aux Affaires Familiales en cas d’enfants mineurs ; paiement du prix ; emprunt à la charge de la SCI ; véritable vie juridique de la SCI, etc.

L’abattement de 159 325 € au profit des descendants est toujours en vigueur en cas de donation.
La transmission familiale peut ainsi permettre de rééquilibrer la différence entre le prix d’acquisition, la valeur de donation et l’éventuel prix ultérieur de cession. Ainsi en transmettant le bien à un descendant, une étape intermédiaire permet de figer une valorisation médiane.

Il est également possible d’envisager de faire passer la résidence secondaire au statut de résidence principale, mais il faut pouvoir le prouver très précisément au fisc ! C’est-à-dire disposer par exemple d’avis d’imposition sur le revenu à l’adresse, d’attestations de Sécurité sociale, de factures de chauffage et d’électricité… et éviter que les mêmes justificatifs existent pour l’autre domicile ! Cette « manipulation » est donc à déconseiller vivement.

Enfin, il faut garder à l’esprit que toute modification relative au patrimoine peut inciter le Trésor Public à analyser certains dossiers avec vigilance, notamment quant aux valorisations effectuées par ailleurs en matière d’ISF…

 

Denis DI LEONARDO
Avocat associé
DLSI Avocats


Lex Inside - L’actualité juridique - Émission du 15 novembre 2024 :

Lex Inside - L’actualité juridique - Émission du 13 novembre 2024 :

Lex Inside - L’actualité juridique - Émission du 8 novembre 2024 :