Conditions Générales de Vente : la mort de la case à cocher ?

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Fabien Honorat, Avocat Associé, Péchenard & associésNombreux sont les sites de e-commerce qui font accepter leurs conditions contractuelles (CGU et CGV) en faisant cocher une case face à un lien hypertexte renvoyant vers la page web correspondante. Une pratique classique qui, après un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), a été  juridiquement invalidée. Explications…

Le 5 juillet dernier la Cour de Justice de l'Union Européenne a rendu une décision concernant la question de l'opposabilité des conditions générales de vente dans le cadre de sites de e-commerce (Arrêt Content Services Ltd c/ Bundesarbeitskammer, aff. C-49/11).

L'affaire concernait un site de vente de logiciels en ligne (Content Services). Le processus de vente du site Internet était extrêmement classique :

1- Le consommateur devait s'identifier, choisir son logiciel et valider sa commande en cochant une case précisant qu'il acceptait les conditions générales de vente (CGV) et renonçait à son droit de rétractation.
Les CGV étaient accessibles sur une autre page du site web via un lien hypertexte.

2- Une fois la commande et le paiement validés, le consommateur recevait un email récapitulatif de sa commande.
L'email renvoyait lui aussi aux CGV sur le site et donc via un lien hypertexte.

3- Enfin, le consommateur recevait sa facture. Cette facture rappelait que l’internaute concerné avait accepté de renoncer à son droit de rétractation et qu’il n’avait plus la possibilité de résilier le contrat d’abonnement.

Une association de consommateurs autrichienne a saisi les juridictions de ce pays qui ont fini par solliciter l'avis de la Cour Européenne afin qu'elle prenne position sur la question de savoir si le processus de commande mis en place était conforme à la directive du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 1997, concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance.

L'article 5 paragraphe 1 de cette directive prévoit qu'un site de e-commerce doit fournir au consommateur préalablement à la conclusion de contrat ou, au plus tard au moment de la livraison, par écrit ou via un autre support durable, les informations suivantes : identité du fournisseur; caractéristiques essentielles du bien ou du service ; prix du bien ou du service ; frais de livraison ; modalités de paiement, de livraison ou d’exécution ; une information écrite sur les conditions et les modalités d’exercice du droit de rétractation, l’adresse du service consommateur , les informations relatives aux services après-vente et aux garanties commerciales existants et les conditions de résiliation du contrat lorsque celui-ci est à durée indéterminée ou d’une durée supérieure à un an.

Au regard du processus mis en œuvre par le site web en question, la Cour Européenne estime que :

- Lorsque ces informations ne sont rendues accessibles que par un lien hypertexte communiqué au consommateur, ces informations ne sont pas "fournies" au consommateur au sens de l’article 5.

- La page web reproduisant les CGV ne constitue pas, en soi, un support durable au sens de l'article 5 dès lors que cette page peut être modifiée à tout moment. La Cour précise que ce système ne permet pas au consommateur de stocker ces informations de manière à pouvoir y accéder et à les reproduire telles quelles pendant une durée appropriée en dehors de toute possibilité de modification unilatérale de leur contenu par le vendeur.

Cette décision, même si elle vise un cas d'espèce, va sans doute avoir un impact sur les sites de e-commerce actuels lesquels dans leur grande majorité se contentent de renvoyer à leur CGV via un lien hypertexte sans autre type de communication.

Il est vraisemblable que ces sites devront adapter leur pratique afin de se conformer à cette nouvelle appréciation de la Cour Européenne qui doit en principe s'imposer aux juridictions nationales.

Le non respect des dispositions de l'article 5 de la directive (transposé en droit français par l'article L.121-19 du code de la consommation) peut avoir des conséquences importantes : en dehors d'une amende de 1.500 euros, le délai de rétractation passe automatiquement de 7 jours à 3 mois.

 

Fabien Honorat, avocat associé chez Péchenard & associés


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