Le cas Louboutin, ou comment bien protéger sa protection de marque

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William Lobelson, Associé, Conseil en propriété intellectuelle, Cabinet Germain & MaureauUn dépôt de marque a vocation à protéger le signe distinctif d’un produit, ce qui ne se limite pas à un nom ou un logo.

Il est admis par le Code de la Propriété Intellectuelle que des nuances ou combinaisons de couleurs, des sons et même des formes tridimensionnelles peuvent constituer des marques valides.

Encore faut-il maîtriser la technique du dépôt de marque pour parvenir à ses fins.

Le célèbre chausseur Christian Louboutin dont la signature consiste à colorer de rouge les semelles de ses souliers, a tenté de revendiquer un monopole sur cette caractéristique de ses créations en procédant à un dépôt de marque auprès de l’INPI, consistant dans la représentation d’une semelle rouge. La demande fut acceptée par l’INPI qui délivra un enregistrement.

Mais lorsqu’il s’est agit d’opposer cette marque à ZARA qui elle aussi, proposait des souliers à semelles rouges, Louboutin a rapidement dû déchanter : les juridictions françaises, et en dernier lieu la Cour de Cassation [30 mai 2012], ont estimé que l’enregistrement de marque invoqué devait être annulé au motif que la représentation déposée manquait de clarté et d’intelligibilité, en ce que la couleur exacte revendiquée était imprécise, et qu’en l’absence d’une image en perspective, seule apte à caractériser une forme tridimensionnelle, la marque ne satisfaisait pas aux exigences légales selon lesquelles la représentation graphique de la marque doit être claire, précise, complète par elle-même, facilement accessible, intelligible, durable et objective.

Louboutin n’a donc pas pu empêcher ZARA de vendre en France des chaussures à semelles rouges, non pas en raison du fait que cette caractéristique n‘est pas en soi protégeable, mais simplement parce que le dépôt de marque n’avait pas été effectué dans les règles de l’art.

LouboutinI jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.

La semelle rouge Louboutin fut déposée aux Etats-Unis, mais cette fois selon les prescriptions énoncées ci-dessus :

Et en septembre de cette année, un Tribunal américain a jugé la marque parfaitement valide, et opposable à la société Yves Saint Laurent, qui s’est vue interdire la commercialisation de souliers à semelles rouges aux Etats-Unis.

Cette affaire met en relief deux points importants de la pratique du Droit des marques. Tout d’abord que la validité d’une marque, bien qu’enregistrée, peut être remise en cause devant l’ordre judiciaire en réponse à une action en contrefaçon.

Ensuite que le dépôt d’une marque, qui peut apparaître pour le profane comme une simple formalité administrative, requiert en vérité l’expertise juridique d’un spécialiste.

La forme de la demande d’enregistrement (en particulier la représentation du signe, et la rédaction du libellé des produits et services revendiqués) détermine la validité et le champ de protection de la marque, et doit donc être adaptée à chaque cas.

 

… pour que chacun trouve chaussure à son pied.

William Lobelson, Associé, Conseil en propriété intellectuelle, Cabinet Germain & Maureau


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