Le contrôle restreint du juge du contrôle

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Xavier MARCHAND, Avocat associé, CaraktersXavier Marchand, avocat associé chez Carakters explique en quoi le contrôle des décisions du juge chargé du contrôle des mesures d’instruction est très restreint. 

Un arrêt de la Cour de cassation du 16 mai 2013 (Civ. 2ème, 16 mai 2013, n° 11-28.060) a récemment confirmé la recevabilité des appels immédiats contre les décisions relatives à la consignation par les parties des frais et honoraires de l’expert en cours d’expertise (CPC, art. 269 et 280), indépendamment du recours spécifique ouvert contre les ordonnances de taxe (CPC, art. 284).
Cette décision n’est que l’application du principe selon lequel les expertises in futurum échappent au droit commun des recours en matière de mesures d’instruction (Cass., Ch Mixte, 7 mai 1982, n° 79-12.006 ; pour un relevé de caducité, Civ. 2ème, 8 févr. 2007, n° 06-10.198 ; pour une modification de mission : Civ. 2ème, 9 septembre 2010, n° 09-69.613).

Au-delà de cette heureuse confirmation, il faut regretter la frilosité de la Cour de cassation qui a préféré considérer n’avoir été saisie que d’une banale question d’imputation d’une consignation de frais d’expertise et ne faire qu’un habile renvoi à "l’appréciation souveraine des juges" pour ne pas avoir à trancher les très nombreuses questions d’ordre procédural qui avaient été portées à sa censure.
Elle avait là l’occasion de préciser un régime procédural bien obscur que récent décret n° 2012-1451 du 24 décembre 2012 systématisant la mise en place d’un juge du contrôle au sein de toutes les juridictions avait soigneusement évité d’éclaircir.

Il est utile de rappeler qu’aujourd’hui encore, le juge chargé du contrôle, saisi "sans forme", convie à son gré les parties par simple « convocation » du greffe à de simples "réunions" à l’issue desquelles sont rendues des décisions qui peuvent revêtir la forme d’une simple mention au dossier. C’est en toute liberté, et sans exigence de motivation ou de réponse aux observations des parties (la forme de celles-ci étant elles-mêmes laissées à la libre appréciation du juge), que le juge fixe le montant des consignations complémentaires et désigne la partie qui devra s’en acquitter. Il suffit d’énoncer ces quelques faits pour mesurer l’ampleur de la tâche qui reste à mener pour permettre de considérer que ce juge serait une véritable juridiction à l’instar du juge de la mise en état ou du juge des référés.

Alors, puisque le législateur ne paraît pas enclin à se saisir de cette difficulté et que la Cour de cassation renâcle à poursuivre le travail créatif que le regretté Pierre DRAI avait initié lors de sa présidence, il reste aux avocats le soin de poursuivre ce combat en contraignant les juges d’appel à préciser par voie d’arrêt les compétences et les principes procéduraux qui s’imposent au juge du contrôle.


Xavier MARCHAND, Avocat associé, Carakters


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