Par un arrêt en date du 25 mars 2014, la Cour d’appel de Versailles a retenu la responsabilité d’un prestataire de téléphonie pour défaut de maintenance et manquement à son devoir d’information et de renseignement.
Une société a eu la désagréable surprise de constater que son système téléphonique avait été piraté, des appels ayant été illicitement passés vers le Timor Oriental pour un montant s’élevant à près de 22.000 euros. Ce système présentait des lacunes de sécurité puisque son mot de passe par défaut (0000) n’avait pas été personnalisé depuis l’installation.
Dans un premier temps, cette société a cherché à échapper au paiement des appels illicites, arguant que ceux-ciavaient été passés par des tiers dans un contexte de piratagequi ne lui était pas imputable.
La Cour d’appel de Versailles a néanmoins rejeté cette demande et a confirmé la décision rendue dans le même sens en première instance, au motif qu’ "il n’est pas contesté qu’elles correspondent au coût des appels passés à partir de sa ligne téléphonique et qu’elles sont conformes aux conditions contractuelles stipulées". La Cour précise à ce titre qu’ "aucune clause ne permet au client d’être déchargé du paiement des appels passés à part de sa ligne au motif qu’ils auraient été passés par des tiers (…)".
A titre subsidiaire, la société a recherché la responsabilité des différents prestataires concernés au titre de différents manquements contractuels : en première instance, la société victime a été déboutée de l’intégralité de ses demandes et c’est pourquoi elle avait interjeté appel de cette décision.
La Cour d’appel a partiellement infirmé la décision du Tribunal et a fait droit aux demandes de la société victime contre le prestataire en charge de la maintenance de son système téléphonique.
En effet, la Cour a retenu que le contrat conclu par les parties prévoyait l’engagement par ce prestataire de fournir à la société une information sur les évolutions techniques en matière de télécommunication pouvant intéresser l’exercice de son activité et à procéder à une « visite préventive » annuelle.
La Cour s’est, en outre, appuyée sur un bon de commande établi par le prestataire lors de la dernière visite précédant les faits, aux termes duquel il indiquait avoir mis à jour l’installation téléphonique "afin de mise en conformité avec les règles de sécurité".
La Cour en a donc conclu que le prestataire avait manqué à son obligation de maintenance et d’information en n’indiquant pas à son client qu’il fallait personnaliser son mot de passe et le modifier régulièrement, jugeant à ce titre qu’une simple information sur les « règles minimales de sécurisation du système »n’était pas suffisante.
En revanche, la Cour d’appel a confirmé la décision rendue en première instance s’agissant :
- d’une part de l’opérateur : la société estimait en effet que ce prestataire avait notamment manqué à son obligation de sécurisation de son réseau et de son matériel. La Cour s’est néanmoins focalisée sur le fait qu’en l’espèce "le choix d’un mot de passe confidentiel et régulièrement modifié était de nature à garantir la sécurisation de l’installation téléphonique et à écarter les risques de piratage", la preuve de la nécessité de mesures de sécurisation supplémentaires n’étant pas rapportée ;
- d’autre part, de l’installateur : en l’espèce, la société ayant procédé à l’installation initiale avait fait l’objet d’un plan de cession et la Cour d’appel a refusé d’engager la responsabilité du repreneur au titre d’un potentiel "manquement au devoir d’information et de conseil auquel était tenue cette société en tant que vendeur et installateur".
La Cour s’appuie donc largement sur les termes de l’accord conclu entre les parties pour en déduire que le prestataire de maintenance avait manqué à ses obligations contractuelles.
En pratique, il conviendra que les parties, prestataire comme client, soient particulièrement vigilantes sur la rédaction à la fois du contrat définissant le cadre de la prestation dont il fait l’objetainsi que des différents documents techniques échangés (tels que des bons de commande ou relevés d’intervention), lesquelsconstituent usuellement des référentiels contractuels.
Olivier HAYAT, HAYAT AVOCAT