Contrairement à la géolocalisation en temps réel d’un téléphone portable, qui doit faire l’objet d’un contrôle préalable par un juge ou une entité administrative indépendante, la géolocalisation d’un véhicule peut être ordonnée, pour une durée limitée, par le procureur de la République.
Au cours d’une enquête pénale, un procureur de la République a autorisé la géolocalisation en temps réel des véhicules et du téléphone d’un individu.
Les données recueillies ont mis en lumière la possible implication de cette personne dans une collecte d’argent liée au trafic de drogue.
Mis en examen, l'intéressé a fait valoir que les mesures de géolocalisation dont il avait fait l’objet devaient être annulées car elles n’avaient pas été soumises à un contrôle préalable tel que l’exige le droit de l’Union européenne.
La cour d’appel de Lyon a refusé de faire droit à cette demande, estimant que le droit de l’Union n’exige pas de contrôle préalable lorsque la mesure est autorisée par un procureur de la République.
Dans un arrêt rendu le 27 février 2024 (pourvoi n° 23-81.061), la Cour de cassation valide cette décision s'agissant de la géolocalisation en temps réel du véhicule : les exigences de la directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002 concernent uniquement les services de communication électronique accessibles au public. Or, la géolocalisation d’un véhicule ne mobilise pas ces services.
La chambre criminelle en déduit qu’une telle mesure de géolocalisation en temps réel d’un véhicule peut être autorisée directement par un procureur de la République, pour une durée limitée, conformément aux règles du droit français.
En revanche, la Haute juridiction judiciaire censure les juges du fond concernant les mesures de géolocalisation en temps réels du téléphone portable, soumises à ladite directive.
Le code de procédure pénale autorise le procureur de la République à ordonner la géolocalisation d’un téléphone et permet aux enquêteurs d’accéder en temps réel aux données de localisation de l’appareil, sans prévoir de contrôle préalable de ces mesures par une juridiction ou une entité administrative indépendante : cette règle est contraire au droit de l’Union.
La chambre criminelle précise toutefois que l'annulation d'une mesure de géolocalisation de téléphone n'est possible que si l’irrégularité constatée a occasionné un préjudice à la personne mise en examen. Ce préjudice est établi lorsque le recours à la géolocalisation a eu lieu dans le cadre d’une procédure qui ne relevait pas de la lutte contre la criminalité grave ou que cette mesure n’était pas strictement nécessaire aux besoins de l’enquête. Or, les juge du fond n'ont pas vérifié si tel était le cas en l'espèce.
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