Jérémie Caron, Directeur Juridique d’Adisseo, revient sur les enjeux liés au rachat de sa société par un grand groupe chinois, et les conséquences d’une telle manœuvre sur le travail d’un département juridique.
La prise de possession de la société Adisseo par le groupe chinois BlueStar a-t-elle entraîné des changements profonds en termes de management ?
Le groupe Adisseo a été constitué en 2002 par la cession à CVC Capital Partners de la branche "nutrition animale" du groupe Aventis. Cette cession a été suivie d'évolutions importantes en termes de management et de pilotage, dues à la nouvelle situation de LBO.
Le groupe Bluestar, filiale de China National Chemical Corporation, première entreprise chinoise dans le domaine de la chimie, a acquis Adisseo en 2006, et a maintenu le management et les méthodes de travail.
En particulier, Adisseo dispose d'une grande autonomie sur le plan opérationnel. Chaque département reporte à notre direction générale, qui, en accord avec notre actionnaire, définit les orientations stratégiques du groupe.
Au cours de la due diligence, les juristes ont-ils été interviewés ?
La participation du département juridique, à l'époque composé de trois personnes, a consisté en un travail de compilation des risques juridiques, des litiges et des contrats. Bien entendu, une vigilance particulière a été portée sur les accords pouvant être remis en cause par le changement de contrôle envisagé.
En tant que juriste, devez-vous faire face à des problématiques inédites, notamment en termes de reporting ?
Un système de remontée d'informations, principalement centré sur les risques et les contentieux, avait été mis en place à l'époque CVC. Ce reporting a continué à être développé après 2006, mais je ne peux pas dire qu'il y ait une spécificité liée à notre appartenance à un groupe chinois.
Par ailleurs, les dossiers liés à la structure du groupe sont menés en collaboration avec la direction financière de Bluestar. On remarque à ce propos que l'harmonisation des concepts juridiques, fiscaux et financiers, que chacun peut relever en discutant avec des interlocuteurs européens ou américains, concerne également la Chine.
Autrement dit, les problématiques familières aux juristes français, par exemple en matière de droit des sociétés, de technique contractuelle ou de fiscalité sont parfaitement comprises par nos collègues chinois. Trente ans d'ouverture économique ont permis aux grands groupes chinois de se doter de managers, souvent formés à l'étranger, qui sont parfaitement à même de vous challenger...
La question du transfert de technologies se pose-t-elle dans ce contexte d'une manière nouvelle ?
Adisseo construit, en partenariat avec son actionnaire, une usine située à Nanjing (Nankin), qui n'aurait vraisemblablement pas pu être édifiée sans le support d'un partenaire chinois.
En conséquence de l'harmonisation des concepts juridiques, à laquelle je faisais référence, l'architecture contractuelle que nous avons mise en place est assez classique. Comme dans tout groupe, un ensemble de contrats (licence, prestation de services...) a été signé pour régir les relations entre notre entité européenne et l'entité exploitante du site.
A propos
Cet article provient du numéro 13 de Juriste Entreprise Magazine (JEM), magazine de l'Association Française des Juristes d'Entreprise (AFJE) dont le dossier spécial est consacré à la mondialisation..
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