Si l'aide juridictionnelle s'est invitée au Congrès des avocats, Pascal Eydoux comme Emmanuel Macron ont également évoqué d'autres sujets sensibles comme les relations entre les avocats et les experts-comptables, l'interprofessionnalité ou encore l'avocat en entreprise.
Lors de l'ouverture du Congrès des avocats qui s'est déroule vendredi 9 octobre à la Maison de la Mutualité, Pascal Eydoux, Président du Conseil national du barreau (CNB), s'adressant à Emmanuel Macron, a affirmé que "les avocats, profession la plus diversifiée, constituent la seule profession réglementée qui aborde l'ensemble de ses activités sur un marché concurrentiel étranger à tout monopole et tout privilège d'exercice" alors que leurs amis concurrents, notaires, huissiers par exemple, bénéficient d'une activité protégée par des monopoles injustifiés qui garantissent leur développement économique et financier constant".
Par ailleurs, le Président du CNB a regretté que les avocats ne puissent pas accomplir des actes à titre accessoire alors que les experts-comptables peuvent accomplir des prestations juridiques à titre accessoire.
En ce qui concerne la réforme de la postulation introduite par la loi sur la croissance et l'activité, il a indiqué que "cette loi a pour première conséquence de modifier les règles applicables à la postulation des avocats, c’est-à-dire l’accompagnement des justiciables devant les juridictions de leurs territoires. Vous avez ainsi contrarié la Province. Nous vous avons montré que la représentation en justice méritait le maintien d'une forme de compétence territoriale."
Sur l’obligation de conclure une convention d’honoraires avec ses clients, Pascal Eydoux l'estime "utile". Nous le savions et nous la pratiquions déjà. En effet, elle s’inscrit dans le cadre du rapport de confiance qui cimente la relation de l’avocat avec ses clients. Cependant, nous vous le disons avec fermeté, nous serons très attentifs à la manière dont les agents de votre administration mettront en oeuvre le contrôle de cette obligation".
Pour Pascal Eydoux, "l’interprofessionnalité permet de développer l’offre de services multi ou interprofessionnelle pour offrir aux opérateurs économiques une gamme complète de services dans un lieu unique. La profession d’avocat est engagée dans cette démarche depuis plusieurs années, même avec la profession du chiffre."
"Toute reconnaissance d’un quelconque legal privilege constituerait non pas une obligation mais un droit"
Enfin, s'agissant du statut d'avocat en entreprise, le Président du CNB, a rappelé que "le Conseil national a créé un groupe de travail largement ouvert à ses membres de toutes tendances. Nous avons repris le dossier relatif aux conditions dans lesquelles l'avocat libéral pourrait exercer au service exclusif d'une entreprise, hors du statut du salariat. Ceci exclut naturellement toute reconnaissance d’un quelconque legal privilege qui constituerait nécessairement non pas une obligation mais un droit. Or le secret professionnel constitue, lui, une obligation imposée à tous les avocats. Il ne peut subir l'affaiblissement d'un détournement de son objet comme un droit opposable."
"J'ai découvert que la séparation entre le droit et le chiffre était un sujet aussi sensible que le conflit israelo-palestinien"
Invité du Congrès des avocats, Emmanuel Macron a défendu sa loi sur la croissance et l'activité. "Supprimer la postulation, ce n'est pas mettre la profession cul par dessus tête, c'est continuer la reforme de 2011", a t-il déclaré.
"J'ai découvert que la séparation entre le droit et le chiffre était un sujet aussi sensible que le conflit israelo-palestinien". "Le texte a clarifié les modes d'exercice de la profession d'expert-comptable" a-t-il ajouté.
Au sujet de l'avocat en entreprise, le ministre de l'Economie considère que "c'est la polyphonie corse qui s'exprime à plein. On a parfois du mal à trouver votre nord magnétique". "Il nous faut trouver la bonne reponse au problème de l avocat en entreprise"."Je pense qu'on a pas trouvé l'équivalent fonctionnel du legal privilege".
Enfin, le ministre de l'Economie a constaté que "la révolution numérique est en train d'investir le domaine du droit car il y a un besoin".
"La révolution numérique est en train d'investir les secteur du droit à un rythme extrêmement rapide. pourquoi ? parce-qu'il y a une demande, un besoin", précise le ministre.
Emmanuel Macron explique que des barrières empêchent les avocats d'investir le numérique : des limitations faites ou interdictions au référencement des sites tenus par des avocats, l'interdiction faite aux avocats, de déposer, de porter des noms de domaines, l'interdiction d'afficher des activités dominantes ou encore l'obligation faite aux avocats de rencontrer physiquement leurs clients."Chaque jour vous avez des collègues qui quittent votre profession pour innover". "On peut décider, comme les trois petits singes, de ne rien en voir, rien en entendre et de ne rien dire. J’ai peur que le réveil soit douloureux", prévient-il.
Arnaud Dumourier (@adumourier)
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