Les sénateurs ont adopté ce jeudi 8 juin 2023 l'amendement du président du groupe centriste Hervé Marseille sur la confidentialité des avis des juristes d'entreprise.
L'amendement ajoute après l'article 58 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques les dispositions suivantes :
« Art. 58-1 – S’ils sont titulaires d’un master en droit, ou d’un diplôme équivalent français ou étranger, et qu’ils justifient du suivi de formations initiale et continue en déontologie, les juristes d’entreprise bénéficient, en dehors de la matière pénale et fiscale, de la confidentialité de leurs consultations juridiques pour assurer leur mission de mise en œuvre de la conformité.
« Ces formations sont conformes à un référentiel défini par arrêté conjoint du ministre de la Justice et du ministre chargé de l’Économie, sur proposition d’une commission dont la composition et les modalités de fonctionnement sont fixées par décret. »
Dans un communiqué du 9 juin 2023, l’Association française des Juristes d’entreprise (AFJE), l’Association nationale des Juristes de banque (ANJB) et le Cercle Montesquieu saluent « l’engagement de M. le Sénateur Hervé Marseille et des cosignataires de son amendement, ainsi que le travail des rapporteurs, Mmes les sénatrices Agnès Canayer et Dominique Verien et le soutien de M. Eric Dupont-Moretti, garde des Sceaux ».
Les trois associations considèrent « que les avis favorables de la Commission des lois et du ministre de la Justice sont des signaux forts qui font écho au rapport du Groupe de travail sur la Justice économique et sociale, issu des travaux des États Généraux de la Justice, et qui concluait très clairement pour une évolution en ce sens. C’est une opportunité pour la France de rejoindre les grandes démocraties en rétablissant l’égalité entre les entreprises françaises avec leurs compétitrices. ».
« Cet amendement s’inscrit dans la logique des travaux conduits sous l’égide de la Chancellerie depuis plusieurs mois en coopération étroite avec les représentants des juristes d’entreprise et des avocats. Les juristes d’entreprise restent mobilisés pour qu’à l’Assemblée nationale le principe de confidentialité in rem ainsi reconnu, puisse être complété avec les garanties nécessaires à sa mise en œuvre effective » poursuivent-elles.
Pour le Cercle Montesquieu, « cette décision est un tournant historique qui confirme la reconnaissance de l’importance du droit dans l’entreprise et de ceux qui l’exerce ».
L'association de directeurs juridiques ajoute que « cette avancée majeure qui répond à un enjeu de souveraineté économique des entreprises françaises et permettra enfin, si l’Assemblée Nationale confirme ce principe, de doter les juristes d’entreprises d’un outil fondamental - la confidentialité de leurs avis – notamment pour prévenir efficacement le risque de rupture de conformité par l’entreprise dans un environnement juridique en constante évolution ».
« Cette avancée majeure pour la profession des juristes d'entreprises est remarquable. Saluons le courage politique et la vision de celles et ceux dont l'action a permis d'aboutir à la reconnaissance de ce principe de confidentialité de nos avis et qu'il convient de remercier. Prochaine étape : l'Assemblée Nationale où le Cercle Montesquieu, l'AFJE et l'ANJB poursuivront leur travail de conviction. Ce principe est d'intérêt général et participe pleinement de la protection de la souveraineté économique de nos entreprises » souligne Martial Houlle, Président du Cercle Montesquieu.
Est-ce que cette fois sera la bonne pour le legal privilege, véritable serpent de mer depuis de nombreuses années ?
Rien n’est moins sûr. En effet, il semble aujourd'hui difficile de prédire si l'amendement résistera aux députés tant les rebondissements ont été nombreux sur cette question.
Arnaud Dumourier (@adumourier)