Selon le rapport M&A Insights Q4 2019 d’Allen & Overy, les opérations de fusions-acquisitions ont enregistré un recul de 7% en valeur et de 10% en volume au niveau international. L’année 2019 reste toutefois la 3ème plus importante en termes de valeur et la 4ème en termes de volume au cours des dix dernières années.
L’année 2019 marque un recul conséquent des opérations par rapport à l’année précédente. Cependant, les chiffres exceptionnels de 2018 ainsi qu’une légère correction de la tendance amorcée dans les premiers mois de l’année, où le recul était presque deux fois supérieur (12%), invitent à envisager cette baisse davantage comme un retour à la normale plutôt qu’un véritable repli.
La multiplication des opérations domestiques et la valeur de certaines opérations d’envergure compensent les effets de l’instabilité politique internationale et de l’accélération de la complexité réglementaire.
Face à des mesures protectionnistes, les grands groupes se consolident
L’année 2019 s’est distinguée par l’augmentation des opérations domestiques au détriment des opérations transfrontalières, ces dernières subissant une baisse de 27% par rapport à 2018. Les opérations les plus importantes de l’année ont été des opérations domestiques. Au-delà d’un contexte mondial instable et de l’augmentation des tensions commerciales entre les grandes puissances, certains États ont mis en place des politiques incitant les investissements locaux. Ces mesures nationales stimulantes sont accompagnées d’une complexification réglementaire qui participe à limiter ou encadrer certains investissements internationaux et donc à la montée d’une forme de protectionnisme. C’est notamment le cas des réglementations européennes ou américaines qui se durcissent et poussent les entreprises à revenir à un échelon régional moins élevé.
Cette première tendance est à observer en parallèle du nombre important de transactions stratégiques d’envergure : les opérations de plus 10 milliards de dollars représentent plus de 33% du total des deals et celles de plus de 5 milliards de dollars correspondent à 43% de ce total. La consolidation des grandes firmes, sur le marché intérieur mais aussi à l’international, vient donc contrebalancer les effets d’un resserrement global, en termes de croissance comme d’échelles, et tend à prouver que la mondialisation est loin d’être terminée.
La France poursuit son internationalisation, derrière les États-Unis
Les transactions massives comme LVMH-Tiffany et l’augmentation de 41% en valeur des investissements M&A français à l’étranger témoignent des velléités d’internationalisation des grands groupes, qui s’émancipent d’un marché national trop étroit.
Ces chiffres en forte expansion font des opérations françaises à l’étranger les deuxièmes plus importantes, derrière les États-Unis. Dans certains secteurs, comme l’automobile, les investissements de fusions-acquisitions sont absolument nécessaires afin de s’adapter au développement technologique et conquérir de nouveaux marchés. Le changement de paradigme enclenché avec l’explosion des voitures électriques et autonomes pousse les acteurs traditionnels de l’automobile à s’adapter en tentant des rapprochements mondiaux et en investissant dans des technologies de pointe. Cette évolution, couplée avec le ralentissement du marché automobile mondial, incite aux rapprochements d’envergure, tels que PSA et Fiat Chrystler, ces derniers permettant à la fois l’ouverture sur de nouveaux marchés nationaux ainsi qu’une synergie technologique qui limite les risques et encourage l’innovation.
Cependant la baisse du nombre d’investissements étrangers en France (-25%) et, plus généralement, les mauvais chiffres de l’Europe de l’Ouest (-27%), qui ne représente plus que 18% de l’ensemble des deals M&A, participent à l’installation d’une hégémonie américaine qui semble durable. Près de la moitié des opérations internationales en 2019 était américaine (48% des transactions de fusions acquisitions en 2019), soit 30% de plus que l’Europe de l’Ouest, 36% de plus que l’Asie Pacifique et 38% de plus que la Chine.
« On observe que malgré un ralentissement économique global, un contexte international instable et des incitations de plus en plus importantes à l’investissement local, les deals stratégiques d’envergure représentent une part considérable parmi l’ensemble des opérations en 2019 au niveau mondial. Ces opérations s’inscrivent dans la stratégie de consolidation des grands groupes, qui poursuivent leur internationalisation dans des secteurs clés comme l’automobile ou la santé. » conclut Frédéric Moreau, avocat associé du département Fusions et Acquisitions du cabinet Allen & Overy.