L'évolution des structures de la fonction juridique en entreprise

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Wilfried Barbuscia, Directeur juridiqueWilfried Barbuscia offre au Monde du Droit un éclairage quant à l'évolution de la structure juridique en entreprise.

Nous pouvons constater que même si depuis quelques années beaucoup de sociétés françaises accordent de plus en plus d'importance aux départements juridiques, ceux-ci souffrent encore d'un manque de reconnaissance essentiellement due par méconnaissance de leur travail et par une réputation souvent caricaturale « d'empêcheurs de tourner en rond », ce qui se traduit par une structure souvent réduite à sa plus simple expression.

La fonction juridique dans les entreprises françaises se trouve présente sous divers modèles de structures. D'autres formes existent bien entendu, le but n'étant pas d'en faire un état exhaustif mais de parler des plus représentatives. La plus aboutie est la direction juridique, organisée, hiérarchisée autour d'un véritable manager, membre du comité de direction, prenant part aux décisions stratégiques. Mais ne nous y méprenons pas, seule la moitié des directeurs juridiques sont dans ce cas, même si ce chiffre est en progression nous sommes bien loin encore d'avoir la même considération qu'un directeur commercial ou financier. Ensuite nous trouvons une forme plus classique, le service juridique sous la responsabilité d'un juriste sénior, supervisant une équipe réduite et parfois seulement aidé d'un(e) assistant(e), il est généralement rattaché à la direction financière et rend compte directement au directeur financier. Enfin, la forme la plus minimaliste, le juriste unique, qui selon la taille de l'entreprise reportera directement au dirigeant, mais souvent au directeur financier. Cette dernière est souvent justifiée dans le cas de petites PME.

La fonction juridique dans l'entreprise à hérité d'une structure stigmatisée par l'image qu'en ont les directions générales et par le rôle que de fait on leur prête. Il s'agit d'une fonction support devant répondre aux questions de droit, qui pour beaucoup se réduit aux contrats, aux litiges et au secrétariat juridique pour l'essentiel. Les questions liées aux décisions stratégiques, à la croissance externe sont généralement traitées auprès de conseils externes, le juriste servant de relais dans le meilleur des cas, mais peut être que le « legal privilege » y est pour beaucoup. Je ne parlerai pas du traitement des contentieux pour lesquels le binôme avocat/juriste est indissociable. Ceci étant, nous pouvons aisément comprendre le pourquoi d'une structure très légère de la plupart des services juridique et leur rattachement à une direction qui souvent a du mal à gérer leurs contraintes et leurs besoins.

Heureusement cette mentalité tant à disparaitre, grâce à l'ouverture du marché international et à la confrontation de nos entreprises aux modèles étrangers, où le « legal » est un élément prédominant. D'autre part, les problématiques de « compliance » font que les décisions stratégiques ne peuvent plus laisser de côté la composante juridique. Le besoin de se doter d'une structure juridique interne et surtout efficace est donc essentiel, car rappelons que le juriste a la connaissance de l'entreprise de ses problèmes et de ses besoins, ce que le conseil externe malgré toutes ses qualités ne peut qu'appréhender au travers des données fournies. Cette structure doit être autonome, c'est-à-dire ayant la possibilité de choisir les conseils externes nécessaires, adapté aux besoins, de recruter donc d'avoir un budget. Cette structure doit être capable de « protéger » les intérêts du groupe mais surtout de participer à son développement, de fait, avoir une direction juridique présente au comité de direction est un minimum.

Cela nous amène à ce que nous pouvons appeler la structure juridique élargie. En fait la « compliance » démontre que le droit est transversal car la conformité touche tous les départements d'une entreprise. Si le rôle du département juridique est de superviser cette conformité aux travers de process, d'audits, il n'est pas inutile de finalement regrouper sous son égide tous les services initialement dévolus au même travail. Nous pouvons citer par exemple l'hygiène et sécurité, l'immobilier, l'assurance, voir même la qualité, mais bien d'autres possibilités peuvent exister, chaque entreprise étant unique.

Certains crieront au loup, pourquoi pas, il n'y a pas de vérité toute faite, mais l'évolution d'un métier est essentiel à sa survie et la fonction juridique a trop souffert de sa mauvaise image, de l'idée de son univers étriqué, élitiste et avouons le souvent véhiculée sans mauvaise intention par ses propres victimes. Certes cela demandera une formation adaptée et les universités devront se mettre à la page car l'apprentissage de la matière ne suffit plus, déjà aujourd'hui, à assurer le besoin du juriste en matière de management, de commerce, de communication et de finance, qui sont les outils essentielles au pilotage d'un service, de projets, à la gestion de budgets, à la négociation. Certaines sociétés ont déjà remis entre les mains d'un directeur juridique le management d'autres départements avec pour premier objectif l'optimisation par la synergie des ressources. Comptons que d'autres suivront l'exemple.

 

Wilfried BARBUSCIA


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