Carine Piccio, associée en charge du département Médias, Sport & Entertainment chez Aston société d'avocats, vient de sortir un nouveau livre sur l'audiovisuel, La liberté de la communication audiovisuelle au début du 21ème siècle, chez l'Harmattan, qu'elle codirige avec Pascal Mbongo et Michel Rasle.
Pourquoi ce livre ?
L'avènement de la liberté de communication audiovisuelle a 30 ans. Consacrée en 1982 par le Conseil constitutionnel, elle garantit aux auditeurs et aux téléspectateurs la pluralité des programmes qui leur sont proposés, dans le respect de l'impératif d'honnêteté de l'information, sans ingérence de l'Etat ou d'intérêts privés.
La liberté de communication audiovisuelle est désormais soumise à l'épreuve de la révolution et de la convergence numériques. Un point s'imposait. Aussi, l'ouvrage s'interroge-t'il sur l'équité concurrentielle entre les opérateurs dans ce nouveau contexte, sur les marchés audiovisuels européens, sur l'indépendance des médias audiovisuels à l'égard du pouvoir politique, sur la chronologie des médias, sur les quotas de production et de diffusion, la qualité des programmes, les émissions culturelles, la retransmission des grands évènements sur une télévision à accès libre...
Quel est l'impact d'internet ?
Le 24 avril 2013, la Commission européenne a lancé une consultation sur la convergence entre télévision et internet et a adopté un livre vert qui invite le plus grand nombre à exprimer d'ici à la fin août 2013 une opinion sur la convergence audiovisuelle.
La révolution numérique a démultiplié les possibilités de consommation de contenu et entraîné de profonds changements du secteur de l'audiovisuel.
Les avancées technologiques favorisent le développement de la télévision connectée. Certains considèrent le web comme le prolongement naturel de la télévision classique, dont ils entendent transformer l'écran en un écran d'accès à internet. La télévision connectée, raccordée directement ou non à internet afin d'offrir au public un ensemble de services, répond à cet objectif. Le 5 décembre 2012, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel a présenté 14 propositions visant à "favoriser à l'émergence d'un écosystème durable et équitable autour de la télévision connectée". Ces propositions s'ajoutent à celles de toute une série de missions lancées ces dernières années sur les enjeux de la télévision connectée. Les acteurs du secteur et les autorités cherchent manifestement à anticiper les enjeux juridiques de ce nouvel outil. Pierre Lescure, alors qu'il est mandaté par le gouvernement pour une mission de concertation sur la culture face aux enjeux numérique, ne craint pas d'affirmer qu'"avec la télé-connectée, le piratage sera inarrêtable".
Vous avez traité plus spécifiquement les retransmissions sportives, quoi de neuf sur ce sujet ?
Effectivement, j'ai signé avec Karim Laouafi, avocat au Barreau de Paris, une contribution sur l'exploitation audiovisuelle des manifestations sportives.
En 2012, les droits de diffusion des JO de Londres ont rapporté au Comité International Olympique la somme record de 4 milliards de dollars. Ce montant est à mettre en perspective avec la forte concurrence qui caractérise un marché des droits sportifs des compétitions les plus prestigieuses (JO, Coupes d'Europe de football, etc.) de plus en plus tendu.
Les instances sportives ont compris que la télévision leur offrait un moyen d'accroître la popularité de leur discipline. Nous sommes à l'ère de la convergence entre les médias et le sport, dont l'intérêt économique est fondé sur l'audience, les recettes publicitaires, le sponsoring. Dans ce contexte, l'exclusivité des droits audiovisuels est l'objet d'une surenchère, qu'entre autre chose le droit du public à l'information peut limiter.
Dans ce contexte, le législateur a confié au Conseil supérieur de l'audiovisuel (art.22, loi du 1er février 2012 visant à renforcer l'éthique dans le sport et les droits sportifs) le soin de fixer les conditions de diffusion de courts extraits de compétitions sportives.
Le 15 janvier 2013, le Conseil a adopté une délibération fixant les conditions d'exercice des brèves citations, dont l'objectif est de concilier l'intérêt du public avec les contraintes économiques pesant sur les chaînes et les détenteurs de droits de diffusion.
Propos recueillis par Arnaud DUMOURIER