Lorsque le contrat ne contient aucune clause encadrant la rupture eventuelle des relations contractuelles, le législateur et la jurisprudence soumettent la partie qui souhaite se désengager au respect d'un certain nombre de conditions qui sont parfois difficiles à appréhender.
Si le contrat ne contient aucune clause permettant de mettre un terme à la relation, le législateur et la jurisprudence ont apporté des solutions qui peuvent se résumer comme suit :
Si le contrat est à durée déterminée : il faut prouver que son partenaire a manqué à ses obligations contractuelles de façon suffisamment grave,
Si le contrat est à durée indéterminée : il faut respecter un préavis suffisant qui prend notamment en compte la durée des relations commerciales et la dépendance économique de son partenaire ou prouver un manquement contractuel suffisamment grave.
1. EN CAS D'INEXECUTION CONTRACTUELLE, LES INCONVÉNIENTS DU RECOURS AU JUGE
Lorsqu'en cours de contrat, l'un des partenaires cesse d'exécuter ses obligations, il est possible d'avoir recours au juge qui constatera l'inexécution et actera la fin du contrat.
Le juge dispose néanmoins d'un pouvoir souverain d'appréciation. Si l'inexécution ne doit pas forcément entrainer un préjudice pour le partenaire, le juge ne prononcera la fin du contrat que s'il constate que le manquement est suffisamment grave. Le juge prendra en compte des éléments objectifs (la teneur générale de la convention et les obligations spécifiques des parties), ainsi que des éléments plus subjectifs tels la bonne ou mauvaise foi des partenaires. La jurisprudence a admis que le comportement agressif, injurieux et menaçant d'un contractant pouvait justifier une rupture. De même, un retard significatif a été considéré comme étant un manquement suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat dans la mesure où plusieurs mises en demeure étaient restées infructueuses. Les juges du fond ont également prononcé la résolution d'un marché de travaux à la suite du non-respect par l'entrepreneur du cahier des clauses techniques particulières.
Après analyse des circonstances d'espèce, le juge peut toutefois décider que le manquement n'est pas suffisamment grave pour justifier la résolution. Il peut alors décider d'allouer uniquement des dommages-intérêts au demandeur. Il a également la faculté de privilégier le maintien du contrat en octroyant un délai de grâce au débiteur pour lui laisser la possibilité de s'exécuter. A la lenteur judiciaire s'ajoute donc ici un manque de prévisibilité pour la partie optant pour cette solution.
2. EN CAS D'INEXECUTION, LES RISQUES DE LA RUPTURE UNILATERALE EXTRAJUDICIAIRE
Afin d'éviter ces inconvénients, la partie victime d'une inexécution contractuelle peut également notifier la résolution du contrat à son partenaire sans recourir aux tribunaux. La jurisprudence a en effet admis la résolution unilatérale d'un contrat dans lequel un partenaire persistait à ne pas payer ses factures sous des prétextes spécieux et malgré l'attention soutenue qui avait été portée à ses réclamations par le service commercial de son cocontractant. Une solution identique a été retenue dans l'hypothèse d'une modification unilatérale (augmentation des prix des produits vendus) d'un contrat de distribution. Toutefois, pour opter pour cette solution, il est nécessaire d'être en présence d'une inexécution créant une situation grave nécessitant une résolution immédiate de la relation contractuelle. En effet, la partie n'étant pas à l'origine de la résolution pourra toujours saisir le juge afin qu'il constate l'absence de fondement de la résolution. La partie qui rompt le contrat s'expose donc à une sanction a posteriori du juge s'il ne parvient pas à démontrer la gravité du manquement. Le maintien du contrat pourra en effet être ordonné, ainsi que l'octroi de dommages-intérêts pour rupture abusive.
3. EN L'ABSENCE DE TOUTE INEXECUTION, LE DROIT DE ROMPRE UN CONTRAT A DUREE INDETERMINEE
Lorsqu'aucune durée n'a été stipulée au sein du contrat, il est admis que les partenaires bénéficient à tout moment du droit de rompre cette relation, sous réserve du respect d'un préavis suffisant au regard de plusieurs critères posés par la jurisprudence relative à l'article 442.6 du Code de Commerce notamment. Ce principe est une conséquence de la prohibition des engagements perpétuels. Il a pour objet de préserver la liberté des partenaires et d'encourager la libre concurrence entre acteurs commerciaux. Ce droit n'est toutefois admis qu'en présence d'un contrat à durée indéterminée.
Le signataire d'un contrat à durée déterminée qui cesserait d'exécuter ses obligations sans juste motif, engagerait sa responsabilité et l'exécution forcée du contrat pourrait être prononcée, outre l'allocation de dommages-intérêts.
Constance Tilliard et Sylvie Gallage-Alwis - Hogan Lovells, Paris