La lutte contre la contrefaçon et les douanes

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Catherine Verneret

La défense des droits de propriété intellectuelle est devenue cruciale dans une économie largement ouverte et mondialisée. Le franchissement des frontières fournit aux titulaires des droits de propriété intellectuelle une occasion privilégiée de faire respecter la propriété intellectuelle avec l’aide des autorités douanières.

Par Catherine Verneret, Avocat à la Cour - DS Avocats

Les Douanes sont le bras armé de la lutte contre la contrefaçon. En mars 2009, un plan d’action douanier européen anti-contrefaçon a été adopté pour les années 2009 à 2012 afin de renforcer la lutte contre la contrefaçon. Dans ce cadre, les Douanes françaises ont décidé que la lutte contre la contrefaçon était une de leurs actions prioritaires.

Les Douanes jouent un rôle primordial dans le cadre de la lutte contre la contrefaçon en mettant en œuvre les procédures de retenues des marchandises soupçonnées de contrefaçon des droits de propriété intellectuelle de toute nature. La procédure de retenue en douanes a été mise en place pour la première fois, par les autorités communautaires dans le cadre d’un premier Règlement daté du 1er décembre 1986. Le champ d’intervention et les compétences des autorités douanières dans le cadre de ces retenues en douane se sont largement accrues depuis 1986, le dernier Règlement communautaire date du 22 juillet 2003 (Règlement (CE) N° 1383/2003)

Les dispositions du Règlement communautaire 1383/2003 ont été intégrées dans le Code de la Propriété intellectuelle.

1/ Les marchandises concernées

La retenue en douanes prévue par la réglementation communautaire ne s’applique qu’aux marchandises communautaires soupçonnées de porter atteinte à un droit de propriété intellectuelle se présentant aux frontières de l’Union européenne en provenance de pays tiers, à l’exclusion des marchandises sans caractère commercial, dans la limite de franchises douanières, contenues dans les bagages des voyageurs (règlement CE n° 1383/2003 art.3 § 2). Le règlement communautaire s’applique donc aux marchandises destinées à être importées (marchandises tierces) ou exportées (marchandises communautaires à l’exportation).

La retenue en douane « en dehors des cas prévus par la réglementation communautaire » (art.L.716-8 et art.L.716-8-1) s’applique aux marchandises ayant une provenance communautaire auxquelles il faut ajouter éventuellement les produits portant une marque contrefaisante contenus dans les bagages des voyageurs.
Le droit interne (Code de la propriété intellectuelle) s’applique aux marchandises contrôlées à l’intérieur du territoire national.

La Cour de Justice des communautés européennes considère que la procédure de retenue nationale ne s’applique pas aux marchandises à statut communautaire, légalement fabriquées dans un Etat membre de la Communauté européenne et destinées, après avoir transité par le territoire français, à être mises sur le marché d’un autre Etat membre, où elles peuvent être légalement commercialisées (CJCE 26 septembre 2000 Commission c/ France, aff. C-23/99).

2/ Les droits de propriété intellectuelle concernés

La procédure de retenue fondée sur le règlement communautaire s’applique aux contrefaçons de :

La procédure de retenue fondée sur le code de la propriété intellectuelle s’applique uniquement aux contrefaçons de :

  • marque
  • dessins et modèles
  • droits d’auteur et droits voisins

Les conditions de la retenue :

La retenue d’office :

En l’absence de dépôt par le titulaire de droit d’une demande d’intervention, le règlement 1383/2003 et le Code de la propriété intellectuelle (uniquement pour les marques et dessins et modèles) prévoient la possibilité pour les autorités douanières d’effectuer une retenue d’office dite « retenue ex officio » lorsqu’il existe des motifs suffisants de penser qu’il s’agit de marchandises portant atteinte à un droit de propriété intellectuelle. La durée de retenue est limitée à un délai de 3 jours ouvrables pendant lesquels le titulaire du droit doit déposer une demande d’intervention auprès de l’administration des douanes. Si dans le délai de trois jours, le titulaire n’a pas procédé à cette demande d’intervention, la procédure de retenue des marchandises est levée.

La retenue sur demande d’intervention du titulaire du droit :

Le titulaire du droit doit au préalable déposer une demande écrite à l’administration des douanes afin de demander la retenue des marchandises soupçonnées de porter atteinte à ses droits.


Le demandeur doit rapporter la preuve de la titularité de son droit. La procédure de dépôt de demande d’intervention est gratuite. Elle est valable 1 an et renouvelable sur simple demande. Cette procédure de retenue permet au demandeur de bénéficier d’une retenue des marchandises pendant 10 jours. Le demandeur, le Procureur de la République ainsi que le déclarant ou le détenteur des marchandises sont informés immédiatement de la procédure de retenue.
Le demandeur pourra obtenir des informations concernant :

  • la nature et la quantité réelle ou estimée de la marchandise contrôlée, accompagnée de photographies
  • le nom et l’adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire ou du détenteur des marchandises ainsi que leur quantité, leur origine et leur provenance sur demande écrite du titulaire.

Dans le délai de 10 jours à compter de la notification de la retenue des marchandises, le titulaire de droit doit prendre les mesures conservatoires ou intenter une action au fond. A défaut, la retenue est levée.

La contrefaçon de marque et de dessin et modèle : un délit douanier

En France, l’importation ou l’exportation de marchandises contrefaisantes constitue un délit douanier spécifique et ce parallèlement au délit de contrefaçon. Dès que les autorités douanières constatent la réalisation d’un délit douanier, elles agissent de manière autonome sur la base de l’article 38 du Code des Douanes qui définit les marchandises prohibées par le Code des douanes.

La procédure douanière aboutit dans la majorité des cas à des transactions ou à des destructions des marchandises saisies sans qu’un tribunal n’ait statué sur la contrefaçon.

Le code des Douanes ne s’applique ni à l’entrée ni à la sortie de marchandises communautaires sur le territoire douanier à destination des autres Etats membres. Selon l’article 4 §7 du Code des Douanes communautaires, les marchandises communautaires se définissent comme étant :

  • les marchandises « entièrement » obtenues sur le territoire douanier de la Communauté,
  • les marchandises importées de pays tiers et mise en libre pratique,
  • les marchandises obtenues dans la CE à partir des marchandises visées aux alinéas précédents.

Lorsque les Douanes agissent sur le fondement de l’article 38 du Code des Douanes, le propriétaire de la marque ou du dessin et modèle contrefaisants est irrecevable à agir civilement devant le tribunal saisi par les Douanes.

Le principe est que le l’infraction douanière ne porte atteinte qu’à l’intérêt général et aux droits de l’Etat.


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