Déjà prégnant au moment de sa saisine en fin d’année 2019 par le président du Sénat, le sujet de la lutte contre le chômage revêt un caractère d’urgence au regard de la crise économique qui se dessine.
La pandémie de Covid-19 et la récession économique qu’elle provoque viennent en effet renforcer l’importance de juguler ce chômage de longue durée. A défaut de mesures fortes sur la coordination des acteurs et l’optimisation des dispositifs, cette nouvelle crise pourrait se traduire non seulement par une explosion du chômage (+ 22,6 % en catégorie A pour le seul mois de mars 2020) mais aussi par un allongement de sa durée et exposer ainsi de nombreux demandeurs d’emplois à des risques accrus d'exclusion.
Dans ce contexte, fixer un cap et le tenir avec volontarisme est essentiel. Pour nourrir les initiatives de la chambre parlementaire et l’action des pouvoirs publics à cette aune, le CESE présente plusieurs préconisations opérationnelles, pratiques et au plus près de la réalité des territoires, parmi lesquelles :
- Assurer un pilotage de niveau régional, s'appuyant sur la contractualisation entre les acteurs de l'emploi, de l'insertion et du monde économique
Pour assurer une répartition efficace des rôles en matière d'accompagnement et de suivi des personnes vulnérables sur le marché du travail, le CESE recommande de prévoir une contractualisation de niveau régional au sein d'un consortium qui réunirait la région, les départements, les OPCO en territoires, les acteurs de l'IAE, les composantes du service public de l'emploi et du futur service public de l'insertion.
Dans cette même ambition, le CESE préconise que la compétence économique des régions soit renforcée par l'attribution d'un rôle d'anticipation des mutations économiques et de GPEC territoriale dans les bassins d'emploi de leur ressort.
- Mettre en place un suivi de l'accès des salariés à la formation professionnelle sur la base d'indicateurs précis
L'accès à la formation est déterminant pour le maintien et le développement de l'employabilité. Le CESE recommande d'inscrire dans le contrat d'objectif et de gestion de France compétences un suivi précis de l'accès à la formation pour les salariés (avec une attention particulière portée aux entreprises dont l'effectif est compris entre 50 et 299 salariés qui ne bénéficient plus pleinement de la mutualisation des fonds de la formation professionnelle), une pluralité d’indicateurs communs (tels que la répartition des bénéficiaires par taille d'entreprise d'origine, la répartition hommes/femmes, cadre/non cadre, le niveau de qualification, le niveau des formations suivies et leurs objectifs certifiants, les dispositifs mobilisés, les perspectives professionnelles associées à la formation), ainsi que l'élaboration d'un indicateur permettant par étude de cohorte, de mesurer les effets postérieurs de la formation sur le parcours des salariés.
- Assurer le maintien en emploi
Le CESE soutient le recours à l'activité partielle et recommande le maintien de l'élargissement de son champ d'application ainsi que la prolongation de son dispositif exceptionnel face à la crise. Il préconise que les administrations compétentes de l'État soient pourvues des moyens nécessaires au contrôle de la mise en œuvre de ce dispositif, tout particulièrement dans le contexte de la pandémie du Covid-19.
À terme, il considère indispensable de mieux définir les rôles respectifs des Direccte et des collectivités locales pour maintenir l'emploi dans les territoires, en lien avec l'ensemble des acteurs économiques et tout particulièrement avec les TPE-PME. Dans la perspective de la relance de l'activité, le levier de la clause sociale devra être pleinement utilisé par les collectivités et les entreprises, pour favoriser l'insertion professionnelle des publics éloignés de l'emploi.
Concernant plus spécifiquement les seniors, dans une logique de prévention des effets de la pénibilité et de sécurisation des parcours professionnels, le CESE préconise que les branches professionnelles identifient les emplois de reconversion envisageables et les formations correspondantes le cas échéant nécessaires, par bassin d’emplois et secteur d’activité.
Le CESE préconise en faveur des seniors demandeurs d'emploi depuis plus d'un an, âgés de 57 ans et plus, la mise en place d'un contrat de travail permettant, avec une incitation financière pour l'employeur, le retour et le maintien dans l'emploi jusqu'à la retraite. Afin de prévenir les usages abusifs d'un tel dispositif, le CESE recommande d'en écarter les entreprises qui auraient procédé à un licenciement économique ou à une rupture conventionnelle avec un senior dans les 12 mois qui précèdent.
Cet avis, rapporté par Luc Bérille (Groupe UNSA) et Jean-Michel Pottier (Groupe des Entreprises), au nom de la Section du travail et de l’emploi, présidée par Alain Cordesse (Groupe des Entreprises), a été présenté lors de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental du 24 juin 2020.
L’avis a été adopté en plénière avec 96 voix pour, 14 voix contre et 2 abstentions.