Le Monde du Droit a interrogé Nathalie Attias et Nicolas Lerègle, candidats au bâtonnat et vice-bâtonnat du barreau de Paris.
Pourquoi vous présentez-vous ?
Nathalie Attias (NA) : Notre candidature est issue d’un double constat.
D’abord, nos confrères rejettent massivement l’institution ordinale et ne s’intéressent plus à celle-ci. En effet, les meilleures mobilisations électorales montrent que seulement 11.000 avocats votent sur près de 28.000 avocats parisiens.
Ensuite, l’Ordre est désormais perçu comme une « monarchie ». Nous sommes tous confrontés aux sempiternels mêmes discours des eternels mêmes intervenants que nous avons déjà vu partout dans les différentes strates des institutions. Ce qui au final nous offre, toujours les mêmes discours portés par les mêmes candidats qui sont dans les institutions depuis de nombreuses années.
Notre candidature est une rupture, pire un tremblement de terre. Nous sommes en rupture avec ces schémas parce que nous respectons profondément l’institution et que nos confrères ont besoin d’avoir des représentants qui vivent au quotidien la difficulté comme la joie d’être avocat.
Notre nombre a fortement augmenté, il est temps de créer du lien avec l’Ordre et d’être sincères : on ne peut pas faire croire aux confrères que l’on va tout changer en deux ans.
Nicolas Lerègle (NL) : Notre volonté est d’améliorer l’institution et la perception que les confrères lambas soit 85% ont de celle-ci. L’institution a une vraie vocation, une mission fondamentale de défense et de promotion des confrères.
Nous sommes scandalisés que la situation actuelle de renouvellements multiples des mandats, nous amène petit à petit à une composition du conseil de l’Ordre qui ne sera plus représentatif que des anciens bâtonniers. Il est grand temps que le barreau se réveille et prenne conscience comme de nombreuses professions de l’importance de se mobiliser pour nos institutions qui doivent être représentatives de nos différentes pratiques du droit.
Notre candidature souhaite également poursuivre les actions entreprises depuis une dizaine d’années et qui méritent de l’être. Il en est ainsi des réflexions du bâtonnier Castelain sur la place de l’Ordre de Paris au sein d’une organisation nationale de la profession ou encore des actions du bâtonnier Féral-Schuhl en faveur des préoccupations professionnelles quotidiennes des avocats.
Vous proposez d’inverser à mi-mandat, les fonctions de bâtonnier et vice-bâtonnier. Comment est-ce que cela fonctionnera ?
NA : L’institution du binôme bâtonnier/vice-bâtonnier a été très mitigée.
Seul le duo Castelain - Le Borgne a bien fonctionné car il reposait sur une répartition des tâches.
Nous proposons une approche pragmatique avec une répartition des rôles et des mandats qui empêchera toute querelle d’ego. Au bâtonnier le rôle de représentant institutionnel des avocats de Paris et au vice-bâtonnier celui de la gestion courante de l’Ordre des avocats et établissements assimilés. Au bout d’un an, on inverse les rôles…
NL : Comme vous le savez, la campagne pour le bâtonnat n’a pas été sans mal. Des candidats qui étaient engagés depuis plus d’un an ont dû gérer le report de celle-ci en juin 2015 avec une réduction du Dauphinat à six mois.
Puis, l’on apprend la candidature du vice-bâtonnier. Le Dauphinat n’a donc été supprimé que pour laisser la place au vice-bâtonnier. C’est inadmissible !
Sur le principe, que le vice-bâtonnier puisse être un successeur du bâtonnier, ce pourrait ne pas être une mauvaise idée. Cela permettrait d’assurer une continuité de l’action.
C’était d’ailleurs, la logique du Dauphinat.
Cependant, le Dauphin a été perçu par de nombreux bâtonniers comme une entrave à leurs pouvoirs lors de la seconde année de mandat.
Le bâtonnier en place a donc souhaité s’en débarrasser. Mais alors pourquoi le recréer avec son vice-bâtonnier dont on peut dès lors se demander à quoi il a servi ?
Notre proposition évitera que ce piètre scénario se reproduise et ternisse plus encore l’image désastreuse de la tête de notre Ordre.
Pouvez-vous nous parler de votre programme ?
NA : En quelques points nous souhaitons mettre en place :
Une structure de gestion comptable, sous l’égide de l’Ordre, destinée aux clients des avocats et qui s’interdirait toute prestation juridique.
La labéllisation de cabinets d’expertise comptable s’interdisant toutes prestations juridiques.
L’Élaboration de schémas de partenariats entre avocats et professions non réglementées dans le cadre de nos nouveaux métiers.
La mise en œuvre, sous l’égide de l’Ordre, d’une procédure de transmission de cabinets échelonnée sur 1 à 5 ans au bénéfice de jeunes diplômés.
La création d’un Centre d’Étude, de Consultation et de Documentation élargissant le domaine de la Grande bibliothèque du droit pour tendre vers un véritable laboratoire de construction de droit.
La valorisation des avocats honoraires – observateur au Conseil de l’Ordre et tutorat de jeunes diplômés.
La refonte de la gouvernance des commissions ouvertes. Les Présidents des commissions ouvertes seront élus par les membres de celles-ci.
Que pensez-vous de la gouvernance de la profession ?
NL : Aujourd’hui, nous comptons près de 200 barreaux alors même que nous allons avoir 13 régions. Il me semble qu’il serait opportun de revoir l’organisation de la profession avec 13 barreaux qui élisent un Président qui aurait ainsi une représentation nationale.
Ainsi, la Conférence des bâtonniers n’aurait plus la même raison d’être et le CNB deviendrait un Ordre national représentatif.
NA : La loi Macron a donné lieu à une dissonance au sein de la profession.
C’est une erreur du barreau de Paris ne pas avoir pris part à la manifestation avec les autres barreaux. Au final, le barreau de Paris s’est affaibli car les pouvoirs publics se sont plus adressés au CNB qu’à l’Ordre des avocats de Paris sur certains sujets.
Il faut y remédier. C’est pour cela que la réflexion de l’Ordre national qu’a évoquée Nicolas doit être engagée. C’est une réflexion que l’on ne pourra pas mener seuls.
Qu'avez-vous de plus que les autres candidats ?
NL : Nous sommes complémentaires. Nous nous connaissons très bien. Cela évitera les mauvaises expériences passées dans les duos bâtonnier / vice-bâtonnier.
Nous avons construit un programme moins prétentieux que le programme du bâtonnier en place mais pragmatique et réalisable. Ce que nous proposons, nous pourrons le faire pendant notre mandat et sans dépenses excessives ! Surtout, nous le ferons en complément de la poursuite des actions engagées par nos prédécesseurs et qui méritent de l’être. Au delà des programmes de chacun, le quotidien de l’Ordre et de nos confrères obligent chaque équipe en place à réagir à l’actualité et à engager les réformes correspondantes. Ne les négligeons pas.
NA : En effet, nous sommes les plus pragmatiques, les plus concrets. En outre, nous sommes accessibles car nous sommes comme nos confrères. Nous sommes institutionnels sans être issus de l’institution c’est une garantie d’une approche nouvelle.
Je suis engagée dans des campagnes pour le bâtonnat depuis 20 ans. Nous constatons que nos confrères ne lisent pas les programmes et que pour eux, les candidats sont « bonnet blanc et blanc bonnet. » Cela vient sans aucun doute du fait que les programmes sont éloignés des préoccupations de nos confrères.
Si on veut mobiliser les avocats parisiens et leur être vraiment utiles, il faut davantage de pragmatisme. C’est ce qui a été fait par exemple par l’ancien bâtonnier Christiane Féral-Schuhl avec Praeferentia et le barreau entrepreneurial. Nous nous inscrivons dans cette démarche d’actions et d’efficacité au bénéfice de nos confrères.
Propos recueillis par Arnaud Dumourier(@adumourier)
A propos des candidats
Nathalie ATTIAS, Candidat au Bâtonnat 2016
Avocat au barreau de Paris depuis 1989.
Exerce en droit social au cabinet Anslaw Avocats avec Nicolas LEREGLE.
Nicolas LEREGLE, Candidat au vice-Bâtonnat 2016
Avocat au barreau de Paris depuis 2004.
Associé avec Nathalie Attias au sein de Anslaw.
En 2012, il a été délégué chargé de l’intelligence économique dans le cadre de la convention entre le barreau de Paris et la délégation interministérielle à l’intelligence économique.
Site de campagne de Nathalie Attias et Nicolas Lerègle, "Pour une élection au Bâtonnat de Paris – vraiment – utile aux Avocats" - http://leregleattias.com/
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