Quand les insectes servent la santé et la justice

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Palliatifs à la chirurgie, antalgiques ou anticoagulants après une opération, les insectes prennent une place croissante dans la médecine française et internationale. Ils sont aussi d’excellents auxiliaires de la justice en matière de médecine légale dans la résolution des enquêtes. Un monde microscopique qui questionne au regard de sa taille, face à la force que l’homme prétend détenir en de nombreux domaines. Découverte de ces auxiliaires de la santé et de la droit.  

Les insectes comestibles font partie intégrante du régime alimentaire de l’homme à travers l’histoire et même à notre époque contemporaine. Si une répugnance peut se manifester à l’idée de les consommer, la planète compte 2,5 milliards de personnes qui s’en nourrissent quotidiennement, principalement en Asie, en Afrique et en Amérique latine. De quoi assouplir nos certitudes d’occidentaux pour peu que l’on comprenne que l’insecte est moyen de subsistance des populations, dans les pays développés comme dans ceux qui vont l’être.  Mais aussi que l’entomophobie est un facteur culturel. Un récent rapport de l’ONU ne dit pas autre chose. De l’alimentation à la santé, il n’y a qu’un pas. 

En effet, l’entomologie, c’est-à-dire la science qui étudie les insectes, fait progresser la médecine au plan international. La recherche fondamentale travaille non seulement à révéler les nombreuses interactions qui existent avec les humains. Mais surtout à proposer des alternatives aux thérapies médicamenteuses ou chirurgicales lorsqu’elles ne peuvent résoudre les pathologies des patients par les méthodes hospitalières et cliniques. 

Soigner de simples pathologies 

Ainsi, les insectes sont de plus en plus sollicités en médecine générale. La Corée du Sud est l’une des pionnières en la matière. Elle n’hésite pas à recourir aux arthropodes reconnus pour leurs vertus thérapeutiques. Ou encore aux scolopendres pour agir sur les problèmes d’articulation. Et même le bombyx contre l’éjaculation précoce. En Russie, l’Alloferon constitue un traitement contre l’herpès. Il est possible d’admettre que ces pathologies sont simples à traiter. Mais les insectes pourraient avoir un rôle à terme pour soigner la douleur si les travaux des chercheurs Chinois et Australiens aboutissent. Ces derniers ont constaté que le venin de la  scolopendre de Chine à tête rouge contient une molécule dont la puissance analgésique serait équivalente à celle de la morphine. 

Est-ce la fin de l’industrie pharmaceutique et médicamenteuse ? Non. En France, l’entomologie médicale est beaucoup plus encadrée. Tout d’abord, les insectes n’entrent que dans 5% environ des molécules naturelles à portée médicinale. Leur utilisation est réglementée par l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire des Aliments, de l’Environnement et du Travail (ANSES). Par ailleurs, le Code de la Santé Publique ne fait pas référence aux insectes et précise uniquement les substances en provenance des plantes. 

Palliatifs à la médecine

Cependant, dans les techniques modernes de médecine en France, la biothérapie progresse dans les hôpitaux grâce aux organismes vivants ou aux  substances provenant de ces derniers. Ainsi, après avoir reçu une greffe, un patient peut bénéficier d'une hirudothérapie. Précisément d’une thérapie par les sangsues médicinales. Elles évitent l’apparition de caillots sanguins à la faveur d’un effet de saignée décongestionnant et anticoagulant voire analgésique, grâce à la morsure et à la succion. De même, lorsque le scalpel et les antibiotiques sont inopérants, les asticots, employés depuis 2005 dans notre pays, sont prescrits de manière temporaire pour venir à bout des plaies chroniques comme les ulcères ou les escarres résistants. Leur intervention va permettre de dissoudre la chair nécrosée.

L’on constate en fait que ces pratiques jugées novatrices dans le sens où elles résolvent ce que la médecine de première intention ne peut solutionner, sont issues de pratiques ancestrales, importées de différentes cultures à travers le monde. A telle enseigne que les laboratoires pharmaceutiques analysent actuellement le potentiel de  l’apiponcture et son application future dans les maladies neurodégénératives telles Alzheimer ou Parkinson. Pour autant, le stade expérimental sur l’homme est encore prématuré du fait que le venin d’abeille demeure allergique chez de nombreux sujets. 

Auxiliaires de la justice 

Les insectes aident aussi la justice, plus précisément la médecine légale. L’entomologie appliquée aux faits criminels, créée par le médecin français Bergeret d’Arbois vers 1850 permet en effet de résoudre des enquêtes de police, des faits judiciaires. Mais elle n’est pratiquée que depuis seulement une trentaine d’années car tardivement adoptée par la justice française. Elle détermine la datation d’un décès lors des constatations post-mortem, par l’étude des insectes présents sur un cadavre. Plus particulièrement des huit colonies successives nécrophages qui vont intervenir durant les mois qui suivent un décès ; ceci jusqu’à la complète dessiccation du corps. Ces insectes détermineront si la personne décédée a été déplacée et révèleront aussi l’hygiène de vie de la victime. 

En conclusion, face aux enjeux climatiques, outre le fait d’admettre que les insectes apportent une contribution indispensable en biologie, leur rôle dans la nature, la santé, l’alimentation et la justice invitent à réfléchir sur notre impact sur l’environnement. Principalement comment chacun de nous peut contribuer à leur sauvegarde. 

Cyrille Darrigade, psychopraticien IPHM et praticien en entomologie intermédiaire


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