Comment déboucler un management package lors du départ d’un dirigeant salarié minoritaire ? Explications par Valérie Duez-Ruff, avocate en droit du travail.
Le management package est un mécanisme souvent utilisé pour attirer, motiver et retenir les dirigeants salariés / cadres clefs au sein d'une entreprise.
En termes simples, un management package est un ensemble d'avantages financiers octroyés aux dirigeants salariés minoritaires, souvent sous la forme d'actions, d'options d'achat d'actions ou d'autres instruments financiers, dans le but d'aligner leurs intérêts sur ceux des actionnaires majoritaires et d'encourager la performance à long terme.
Cependant, lorsqu'un tel dirigeant envisage de quitter l'entreprise de façon anticipée, il est impératif de comprendre les modalités de débouclage de ce dispositif pour préserver ses droits.
Modalités de débouclage et négociation
Le processus de débouclage d'un management package nécessite une planification minutieuse et une négociation fine.
Le dirigeant voulant quitter ses fonctions doit vérifier les conditions contenues dans les pactes d’actionnaires en cas de sortie anticipée.
En effet, ils contiennent généralement des clauses à travers lesquelles les dirigeants s'engagent à céder les actions qu'ils détiennent en cas de cessation de leurs fonctions au sein de la société.
Y sont également prévues les modalités de valorisation financière de ces actions, souvent liées aux circonstances de la sortie, selon que le dirigeant acquiert la qualité de « good leaver » ou de « bad leaver ».
La première correspond à une sortie dans des circonstances considérées comme positives ou acceptables selon les termes de l'accord.
Le statut de bad leaver est craint des dirigeants car il correspond aux départs sans motif valable ou relevant d’un licenciement pour faute. De ce fait, il entraîne des conditions moins avantageuses pour l'exercice des options d'achat d'actions ou la cession des actions détenues.
Plus précisément, dans le cadre de l’attribution d’actions gratuites (AGA), trois paramètres pourront être impactés selon le statut : le vesting, la base de valorisation et la décote.
Le vesting se réfère à la période pendant laquelle un bénéficiaire doit attendre avant de pouvoir exercer son droit sur les actions gratuites qui lui ont été attribuées.
Si en cas de départ en good leaver, le vesting s’applique, un départ en bad leaver peut conduire à ce que 100% des actions soient considérées comme non vestées, et à ce que la base de valorisation de ces actions non vestées soit réduite, avec l’application d’une décote, générant ainsi un préjudice important à son bénéficiaire.
Les détails spécifiques de ces mécanismes étant généralement définis dans les accords de « management package », il est très important de prendre le temps, au moment de leur rédaction, d’en négocier les clauses. Une fois ces accords rédigés, il n’est plus possible d’en contourner l’application.
Alors, tout l’enjeu d’une négociation de sortie anticipée s’attachera essentiellement à conserver au dirigeant le statut de good leaver ou, quand cela n’est pas possible, à compenser les pertes liées à un statut de bad leaver par le versement d’autres sommes.
À cet égard, il faudra également prendre en considération les aspects fiscaux liés à un tel débouclage, notamment au regard de l’imposition sur les plus-values ou au traitement fiscal pour l’entreprise, afin de permettre une optimisation de l’enveloppe de sortie.
Il faudra se montrer d’autant plus prudent si le dirigeant bénéficie de Bons de Souscriptions d’Actions (BSA), qui risque de voir ses gains requalifiés par l’administration fiscale en salaires, comme l’a récemment démontré la Cour de cassation (Ch. Soc. 28 septembre 2023, n°21-20.685)
Compte tenu des forts enjeux financiers et réputationnels liés aux conditions entourant une sortie anticipée de cadre dirigeant, ce dernier devra prendre conseil le plus en amont possible.
Valérie Duez-Ruff, avocate en droit du travail