Les enseignements des statistiques de la Cour d’arbitrage internationale de la CCI pour 2023

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Les statistiques publiées par la CCI pour l’année 2023, année de célébration du centenaire de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI, font ressortir une augmentation du nombre d’affaires soumises à la Cour, confirmant la place de l’institution comme choix incontournable pour le règlement des différends du commerce international. Explications par Philip Dunham, Flore Poloni et Kimberley Bazelais.

La nature des litiges et les montants litigieux

En 2023, la CCI a enregistré 890 nouvelles affaires, marquant la troisième année la plus active de l’histoire de l’institution en termes de volume de dossiers. 1 766 dossiers actifs ont ainsi été administrés par la CCI, tous bureaux confondus (Paris, New York, Sao Paulo, Singapour, Hong Kong et Abou Dhabi).

La CCI administre des arbitrages dans des secteurs d’activité divers et variés. Depuis plusieurs années, une nette prédominance des secteurs de la construction, de l’ingénierie et de l’énergie peut être observée, ces industries représentant ensemble et à elles seules 45% des affaires enregistrées par l’institution en 2023.

Quant aux montants en litige, près de 40% des affaires enregistrées par l’institution en 2023 concernaient une somme inférieure à 3 millions de dollars.  La procédure accélérée de la CCI a été plus largement utilisée en 2023, marquant un bond de plus de 50 % par rapport à l'année précédente (189 nouvelles affaires, contre 124 en 2022). La procédure accélérée, qui depuis le 1er janvier 2021 s’applique automatiquement (sauf volonté contraire expresse des parties) dès lors que le montant en litige est en deçà de 3 millions de dollars, permet de mener une procédure en six mois à compter de la conférence de gestion de la procédure. Il est également possible de recourir à cette procédure accélérée sur accord des parties, même lorsque le montant litigieux n’atteint pas le seuil d’applicabilité automatique. En 2023, les parties à 15 des 189 affaires précitées avaient choisi, par « opt-in », de soumettre leur litige aux règles de la procédure accélérée.

Sièges d’arbitrage et lois applicables

En 2023, les sièges d’arbitrage les plus populaires étaient la France (99 affaires), le Royaume Uni (85), la Suisse (79), et les États-Unis (66).

Ces chiffres révèlent une préférence pour les juridictions dans lesquelles le droit de l’arbitrage est à la fois suffisamment développé et libéral, et dans lesquelles les usagers de l’arbitrage peuvent notamment bénéficier d’un appui efficace des juridictions étatiques. Les sièges d’arbitrage dont l’attractivité est bien ancrée, telles que la France, le Royaume Uni ou la Suisse, doivent désormais partager le marché avec d’autres sièges en plein essor, tels que Singapour ou les Émirats Arabes Unis, qui gagnent progressivement la confiance des parties.

Dans la majorité des arbitrages, le choix du siège de l’arbitrage est déterminé par les parties, souvent dans le contrat objet du litige ou autre instrument contenant la clause d’arbitrage. La Cour d’arbitrage de la CCI, qui ne détermine le siège de l’arbitrage qu’en l’absence du choix des parties, n’a ainsi dû exercer cette fonction que dans 8% des affaires enregistrées en 2023, une légère baisse comparativement à 2022 et 2021 (9%).

Le droit anglais demeure le choix privilégié du commerce international : il est la lex contractus dans 131 des affaires de la CCI, suivi par le droit suisse avec 83 affaires, et les droits des États américains (81 affaires). Les droits allemand (62 affaires), mexicain (35 affaires), français et espagnol (33 affaires chacun), brésilien (29 affaires), italien (25 affaires), émirati (22 affaires) et autrichien (20 affaires) complètent le top 10.

L’arbitrage d’urgence

En 2023, la Cour d’arbitrage de la CCI a enregistré 28 demandes d’arbitrage d’urgence, portant le nombre total des cas d’application de ce mécanisme à 240 depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2012. La procédure d’arbitrage d’urgence permet aux parties de solliciter des mesures d’urgence ne pouvant attendre la constitution du tribunal arbitral. L’arbitrage d’urgence a ainsi vocation à répondre aux besoins d’efficacité et de rapidité de certaines circonstances. L’arbitre d’urgence est désigné par la CCI dans des délais très rapides : environ deux jours après la réception par l’institution de la requête et rend sa décision dans les 15 jours du début de sa mission.

Le seuil d’obtention des mesures d’arbitrage d’urgence est élevé. Sur les 27 ordonnances rendues par les arbitres d’urgence, les mesures sollicitées ont été accordées sans réserve dans 3 affaires uniquement, partiellement accordées dans 9 affaires, rejetées dans 13 affaires y-compris pour irrecevabilité et dans 2 autres affaires, les arbitres d’urgence ont rendu une ordonnance d’accord-parties et une ordonnance de clôture. 

La popularité de cette procédure ainsi que celle de l’arbitrage accéléré reflètent une valorisation toujours plus importante, par les usagers de l’arbitrage, des outils permettant d’augmenter l’efficacité de ce mode de résolution des litiges.

Philip Dunham, Flore Poloni et Kimberley Bazelais


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