Le barreau de Paris établit un modèle de contrat d’avocat salarié en entreprise

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Adopté en juillet dernier à une large majorité, un rapport du barreau de Paris propose un modèle d’avocat salarié en entreprise afin d’apporter une réponse pragmatique et ne pas relancer le débat sur l’avocat en entreprise de manière stérile.

L’avocat en entreprise est un sujet de crispation dans la profession d’avocat depuis plus de vingt ans.
Cependant, le barreau de Paris adopte régulièrement des résolutions favorables – même si les majorités sont variables - à la reconnaissance d’un statut d’avocat salarié en entreprise. Ainsi, en 2017, le conseil de l'Ordre barreau de Paris a d'ailleurs reconnu la possibilité qu'un avocat du barreau de Paris exerce en entreprise à la condition qu'il exerce sur le territoire d'un autre Etat membre qui admet qu’un avocat puisse être salarié en entreprise.

Le rapport de Nathalie Attias, Solenne Brugère et Frédéric Sicard propose d’aller plus loin en instituant un contrat salarié d’avocat en entreprise. Ce contrat de travail vise à garantir des conditions d’exercice respectueuses du principe d’indépendance et du secret professionnel.
Rappelons qu’aujourd’hui, il n’est possible d’être avocat salarié que dans le cadre d’un autre cabinet d’avocats.

Garantir l’indépendance de l’avocat salarié en entreprise

Selon les auteurs du rapport, l’indépendance doit concerner les conditions d’exercice et non la subordination éventuelle liée au contrat de travail. Un avocat peut être salarié d’un cabinet d’avocat sans que cela n’affecte son indépendance. Cela signifie qu’il doit pouvoir donner ses avis juridiques librement sans intervention de quiconque.

Par ailleurs, le rapport souligne que le modèle de contrat de travail doit être soumis au préalable ou dès sa signature à l'Ordre pour contrôler que l'ensemble des conditions requises sur le plan déontologique et notamment l’indépendance sont remplies.
Cette préconisation est inspirée de la pratique du Conseil de l’Ordre des Médecins pour les médecins salariés - dans les Ehpad, les crèches, la médecine du travail, les écoles… - qui valide les contrats. Ceux-ci doivent préciser expressément qu’ils conservent une totale indépendance professionnelle vis-à-vis de la structure qui les emploie. Le respect de ce principe est soumis au contrôle de l’Ordre.
Par conséquent, à l’instar des médecins, « l’indépendance de l’avocat salarié devra être garantie par une clause contractuelle d’ordre publique de protection obligatoire à peine de nullité et soumis au contrôle du Conseil de l’Ordre dont relèvera l’avocat(e) », explique Solenne Brugère.

Ce contrat sera régi par le socle déontologique de la profession, quelle que soit la forme de l’exercice des avocats, libéraux et salariés. Il s’agit d’un contrat à durée indéterminée même s’il peut se décliner en contrat à durée déterminée.
L’indépendance matérielle avec un accès de fichiers informatiques distinct et un espace permettant de garantir le secret professionnel doivent nécessairement être prévus.

Lever les obstacles à la création de l’avocat en entreprise

Avec ce contrat, les rapporteurs pensent lever le principal blocage issu des avocats judiciaires qui craignent de perdre de l’activité avec la création d’un statut d’avocat en entreprise. Selon eux, cette crainte est injustifiée. En effet, avec la mise en place de ce contrat, les entreprises reconnaissent au contraire que le « judiciaire » est une spécialité. « L’intégration des avocats au cœur des entreprises va accroître le « réflexe avocat » et le marché des avocats », affirme Nathalie Attias.
Autre problématique que le contrat d’avocat salarié en entreprise entend résoudre : l’absence de secret professionnel et de confidentialité des juristes conduit certains groupes à transférer les directions juridiques européennes à l’étranger. La présence des avocats dans les entreprises permettrait de résoudre cette problématique .
En effet, en introduisant la confidentialité et le secret dans les entreprises, ces dernières seront plus attractives et compétitives.

Enfin, cet outil pourrait également être une solution pour la mobilité des avocats et une réponse aux départs des jeunes de la profession et particulièrement des talents féminins. Selon les derniers chiffres de l’Observatoire de la profession qui viennent d’être publiés par le CNB le 18 septembre 2018, 27,2 % des femmes quittent en effet la profession dans les dix premières années d’exercice contre 18,4 % pour les hommes. « Permettre aux confrères et consoeurs d’exercer en entreprise est une solution bénéfique pour la profession », rassurent Nathalie Attias et Solenne Brugère.

Arnaud Dumourier (@adumourier)


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