La Cour de cassation valide le versement à la procédure des données issues du téléphone d'un avocat au moyen de 330 mots-clés : bien qu'en nombre important, ces mots-clés avaient été retenus strictement et étaient en rapport direct avec l'activité professionnelle de l'avocat et les faits et infractions objet de la procédure.
Un avocat au barreau de la Guadeloupe a été mis en cause dans des faits objet d'une enquête préliminaire, puis d'une information ouverte des chefs d'abus de confiance, escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé.
Sur saisine du juge d'instruction, le juge des libertés et de la détention (JLD) a autorisé des perquisitions, notamment au cabinet de l'avocat.
Cette perquisition a donné lieu à la saisie du contenu du téléphone portable de cet avocat, transféré sur une clé USB. Cette saisie a été contestée par le délégué du bâtonnier au motif de son caractère global.
Après réalisation d'une expertise aux fins d'extraire du contenu du téléphone les éléments correspondant à une liste de 330 mots-clés, le JLD a ordonné le versement à la procédure des éléments ainsi sélectionnés.
Cette décision a été confirmée par ordonnance du 19 décembre 2022 du président de la chambre de l'instruction.
Par arrêt du 5 mars 2024 (pourvoi n° 23-80.229), la Cour de cassation a cassé et annulé cette ordonnance en toutes ses dispositions et renvoyé la cause et les parties devant la juridiction du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel, autrement composée.
Entre-temps, le juge d'instruction a délivré une commission rogatoire aux fins d'exploitation des éléments saisis et a mis en examen l'avocat des chefs susvisés.
Pour rejeter le moyen pris de l'irrégularité de la sélection des éléments saisis par mots-clés, une ordonnance du 28 mars 2024 du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Fort-de-France a énoncé que la saisie avait été effectuée de manière sélective et non intégrale, avec le concours d'un expert, que, si les mots-clés choisis étaient en nombre important, ils avaient cependant été retenus strictement et étaient en rapport direct avec l'activité professionnelle de l'avocat et les faits et infractions objet de la procédure.
Le juge a ajouté qu'il appartenait à l'intéressé de désigner les éléments qu'il estimait sans lien direct avec les infractions poursuivies, afin de permettre leur contrôle, ce qu'il n'avait pas fait.
Il a enfin relevé que l'examen de la proportionnalité de la saisie au regard du périmètre de l'information dépassait l'office du président de la chambre de l'instruction statuant sur le fondement de l'article 56-1 du code de procédure pénale, s'agissant d'une appréciation de la validité des actes du juge d'instruction qui ne peut s'envisager qu'au visa de l'article 173 du même code.
Cette analyse est validée par la Cour de cassation qui rejette le pourvoi dans un arrêt du 10 décembre 2024 (pourvoi n° 24-82.350).
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330 mots-clés pour saisir les données de l'avocat - Legalnews, 8 mars 2024