Le 8 novembre 2024, Didier Migaud, ministre de la Justice, a présenté à Marseille le volet justice d'un plan ambitieux visant à renforcer la lutte contre la criminalité organisée en France. Ce plan, qui s'inscrit dans une démarche gouvernementale plus large, propose une série de mesures pour améliorer l'efficacité de la justice face à cette menace croissante.
Le plan s'articule autour de plusieurs axes principaux, chacun visant à renforcer un aspect spécifique de la lutte contre la criminalité organisée.
Prévention
Dans le cadre de ce plan, une campagne de communication sera lancée pour révéler les liens entre l'usage de stupéfiants, les violences des trafiquants et les infractions qui en découlent. De plus, le nouveau plan anticorruption élaboré par l'Agence française anticorruption intégrera des mesures spécifiques contre la criminalité organisée, renforçant ainsi l'engagement du gouvernement à lutter efficacement contre ce phénomène.
Investigation
Le recours aux outils numériques sera intensifié, notamment ceux déployés par l'Agence nationale des techniques d’enquêtes numériques judiciaires. Cela inclut des techniques telles que la géolocalisation, l'interception de correspondances et la sonorisation. Pour démanteler les rouages financiers des organisations criminelles, les investigations financières seront systématisées grâce à la mobilisation de groupes interministériels composés d'agents des douanes, des finances publiques, ainsi que de la police et de la gendarmerie. Reconnaissant que la criminalité organisée ne connaît pas de frontières, le ministère de la Justice installera un magistrat de liaison à Bogota pour faciliter la coopération judiciaire avec les zones de production et un quatrième magistrat dédié à Bruxelles. Des assistants spécialisés dans la saisie des avoirs criminels seront également déployés à l'étranger pour soutenir les magistrats dans leurs missions.
Poursuites judiciaires
Pour renforcer les capacités d'action contre la criminalité organisée au niveau national, les équipes du parquet de Paris verront leurs effectifs augmentés de 40 %. Ce parquet, actuellement compétent en matière de criminalité organisée au niveau national, évoluera vers un véritable parquet national capable de piloter efficacement les actions avec les parquets interrégionaux et locaux. La coordination entre ces entités deviendra obligatoire afin d'assurer une réponse cohérente face à cette menace. En outre, une cellule nationale de coordination sera créée au parquet de Paris pour dresser un état des menaces et mettre en œuvre une stratégie opérationnelle efficace.
Juges
Pour garantir que les affaires soient jugées dans des délais raisonnables, cinq postes supplémentaires de juges seront créés à Paris. Les effectifs dans les juridictions interrégionales spécialisées (JIRS) seront également renforcés sur tout le territoire afin de répondre aux besoins exprimés par les acteurs sur le terrain. Des renforts seront envisagés pour les parquets généraux et locaux en fonction des besoins identifiés.
Sanctions
Face à l'intolérable situation où les réseaux criminels poursuivent leurs activités depuis les lieux de détention, des mesures spécifiques seront mises en place. Cela inclut le déploiement de dispositifs mobiles pour brouiller les communications et des moyens anti-drones. Des quartiers spécifiques seront créés pour accueillir les détenus en fonction de leur niveau de dangerosité. Par ailleurs, le cadre judiciaire sera adapté pour mieux traiter les mineurs impliqués dans des activités criminelles, avec une multiplication des capacités d'accueil en centres éducatifs fermés.
Réparation
Une mission sera confiée à la déléguée interministérielle à l’aide aux victimes afin d’évaluer les besoins spécifiques des victimes de la criminalité organisée. Ces victimes souffrent souvent d'une stigmatisation liée aux quartiers touchés par ces réseaux criminels. Les associations qui accompagnent ces personnes bénéficieront d'un soutien accru. Le principe "prendre aux criminels pour rendre aux victimes" sera également favorisé par l'affectation sociale des biens confisqués, comme cela a été fait avec une maison confisquée à Marseille au profit d'un accueil pour victimes.
Arnaud Dumourier
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Crédit photo : Isabelle Harsin / SIPA PRESS